Adapter au cinéma une saga littéraire n’est jamais facile, d’autant plus lorsqu’il s’agit de fantastique, et en particulier lorsqu’il s’agit de Stephen King. La Tour Sombre était réputée inadaptable. Hollywood a voulu s’y essayer. Résultat : c’est mauvais, sur tous les points.
Premièrement, c’est mauvais en tant qu’adaptation. Le film représente à peu près 2% des livres, et choisit de démarrer l’histoire en plein milieu. S’il est déjà impardonnable de ne pas ouvrir le film sur le désert, la trame scénaristique est catastrophique. Débuter avec Jake à New-York pour ensuite le faire rencontrer Roland qui pourchasse Walter, ce dernier multipliant les allées et venues entre NY City et le Devar-Toi… On saute du premier au dernier tome de façon éhontée, aussi n’espérez en aucun cas un quelconque respect de la chronologie des bouquins. Pire, on nous sert des moments clés de l’intrigue n’importe comment. De même, oubliez totalement la dimension de voyage parce que, comprenez-vous, en 1H20, on n’a pas le temps de s’embarrasser avec un souffle épique. La moitié des personnages principaux est passée à la trappe, les deux seuls membres du Ka-Tet présent peinent à convaincre. Jake n’est pas spécialement touchant, et sans entrer dans les débats sur le racisme et le communautarisme, aucun lecteur ne s’était imaginé Idris Elba en Roland. Je passe sur les multiples hérésies concernant l’origine de l’histoire, les motivations des personnages, les pseudos easter-eggs… Bref, si vous êtes un lecteur de la saga, le film vous crache au visage tout du long.
Deuxièmement, c’est mauvais en temps qu’œuvre artistique. Les quelques panoramas en extérieur ne sont pas déplaisants, cependant ils sont si rares qu’ils ne parviennent jamais à insuffler un charme, une poésie, à donner du corps à l’imaginaire qu’il est censé représenter. Soyons clairs : ce film ne m’a rien fait ressentir. L’esthétique artistique est bancale, flirtant parfois avec la série Z et les costumes ont dû être achetés à la friperie du coin. En revanche, rien à dire sur la musique : je ne l’ai pas entendue.
Enfin, c’est mauvais en tant que divertissement. J’aurais pu comprendre les défauts cités au-dessus si le film avait répondu aux sirènes d’Hollywood et du pop-corn entertainment. Mais là non plus, je n’y ai pas trouvé mon compte. Amateur d’action, passez votre chemin : vous avez tout vu dans la bande annonce. Et franchement, pour quelqu’un qui ne connaît rien à l’univers, il est quasiment impossible de rentrer dedans. Le spectateur n’a presque aucune explication sur l’histoire, le monde, les enjeux, si ce n’est trois phrases balancées par ci par là. Le film souffre d’un gros problème de rythme, c’est très rapide, les plans durent moins de trois secondes, les scènes s’enchaînent à une vitesse folle sans pour autant rompre l’ennui qui nous enfonce dans notre fauteuil. Affront suprême : de par son intrigue minimaliste et labyrinthique, le film se veut intello, mystérieux, prétend vouloir vous faire réfléchir. Mais pour cela, encore faudrait-il susciter un soupçon d’intérêt ?
Car c’est bien ça le cœur du problème : La Tour Sombre n’a aucun intérêt. Le lecteur sera déçu, le cinéphile sera outré, le spectateur sera perdu. Pire, je ne vois pas comment ce film peut donner envie de découvrir l’univers de cette fantastique saga littéraire, je pense même qu’il ne pourra que refroidir les envies de lecture. Il n’y a rien à en tirer, j’ai passé un très mauvais moment et c’est sans aucun doute l’un des pires films que j’ai vu de ma vie.