Six films, dont un téléfilm, portent ce nom ! Pourrait-on se creuser les méninges, chez les distributeurs ? Celui-ci n’est sorti qu’en France et dans des festivals. Pourtant, il est du plus grand intérêt.
Nous sommes en Serbie, pendant la guerre, et nous suivons Dzoni, jeune soldat (il doit avoir 19 ans et il est pourvu d’une bonne tête), qui vient à peine de terminer sa formation. Avec son peloton, on l’envoie dans une maison isolée au milieu des bois, car il y a du travail en vue : fusiller des prisonniers. On leur montre comment faire, puis on leur ordonne d’y aller. « Je peux pas », objecte Dzoni. « Qu’est-ce que tu dis ? », demande le chef, même pas menaçant. Dzoni ne répond rien, et il y va.
Après avoir fusillé son premier prisonnier, Dzoni se détourne, honteux. Le deuxième, il l’abat sans rechigner. Lorsque le troisième, qui ne veut pas prendre la pose du fusillé modèle, à genoux et le dos tourné, il l’assomme de quatre coups de crosse. Le quatrième, il va le chercher lui-même dans le groupe de prisonniers. C’est un enfant. Il le pousse, le bouscule, le conduit dans un champ et le tue sans hésiter.
Au soir, dans le bus militaire qui les ramène à la caserne, il demande à son copain combien il en a tué. « J’en sais rien, répond le copain, autant que les autres ». Sur place, on leur dit qu’il reste des prisonniers dans le centre culturel, mais tous refusent, ils sont fatigués. Alors, on leur donne quartier libre, et Dzoni va prendre un café, seul. Pour la centième fois de la journée, il regarde ses mains.
C’est un film terrible dans son absence de fioriture. Aucune musique. Il fait très chaud, les hommes boivent de l’eau sans arrêt, ne disent presque rien, ne commentent pas ce qu’ils font. La guerre change ceux qui la font, et pas seulement les victimes. On le savait, mais il faut le répéter sans cesse.