Rien n’essouffle Pavel Lounguine. A la suite de son, déjà, très médiocre «Ostrov», Lounguine réalise «Tzar» (Russie, 2009). Sans exception, tout ce qui faisait défaut dans la bigoterie «Ostrov» est reconduit dans ce «biopic» entremêlé d’Ivan le Terrible et du métropolite Fillip. Les plans d’ensemble sublimes que Lounguine copiait sur Tarkovski, l’interprétation outrancière et hystérique d’une poignée de personnages et les musiques pathétiques retrouvent leur place dans «Tzar». Tout est similaire, presque même les époques, puisqu’entre le sortir de la seconde guerre mondiale dans l’URSS vétuste du Nord d’«Ostrov» et la Russie impériale du XVIème siècle, ce sont les mêmes décors et les mêmes paysages. Mais ce ne sont pas les mêmes cadres, ni tout à fait la même lumière puisque la direction de la photographie est assurée, en l’occurrence, par Tom Stern. Les lieux sont assimilés à des icônes, avec ces mêmes hâles cuivrés et cette même perspective écrasée qui soustrait à l’horizon sa profondeur. En dehors de ce soin pour l’iconographie, le film est pris entre deux sceaux du cinéma. S’il se veut un document pour l’Histoire : D’une il se rend coupable d’un non-sens total (comment le cinéma peut-il vouloir documenter le XVIème siècle alors qu’il n’est apparu qu’au XIXème siècle ?), de deux il verse tellement dans le tragique, dans le dostoïevskien, qu’il se situe alors pleinement dans le champ de la fiction. «Tzar», serait donc une pure représentation fictionnelle du despotisme. Lounguine pèche là aussi, puisque tout ce qu’il dénonce, sentiment haineux, l'avantage de la brutalité barbare sur l’aspiration spirituelle, se révèle être les moyens propres employés par le cinéaste pour figurer son récit. Question posée depuis toujours dans le cinéma de Lounguine : Peut-on dissocier la férocité de sa représentation violente ? «Tzar», frontalement, pose la même question en opposant derechef un empereur fou, aveuglé de barbarie et un pope sage.