« Quelqu’un qui vous comprend, même au bout du monde, est comme un voisin » c’est à la subtilité de ce proverbe chinois que Liliane sera confrontée à la mort de son fils. Délaissant sa vie morne, sa petite banlieue tranquille et un mari inepte, elle décide de partir en Chine récupérer le corps de son enfant, fruit et moteur de sa vie, décédé accidentellement là-bas. Du parcours du combattant pour obtenir un visa, de l’énorme angoisse d’être isolée dans un si vaste pays, ne connaissant ni la langue ni les coutumes, Liliane franchira toutes les étapes qui la mèneront à comprendre celui qu’elle n’aurait jamais du laisser partir. Loin de tout pathos, évitant habilement tous préjugés faciles, Zoltan Mayer signe ici une œuvre admirable qui porte l’amour d’une mère à son paroxysme, mais aussi la fascination pour un pays trop méconnu chez nous. Car au-delà de cette quête, il s’agit bien ici pour Liliane, comme ce fut le cas pour son fils, de se confronter à une culture d’un pays émergent coincé entre traditions et modernité, et d’en tirer au bout du compte une sérénité, une reconnaissance de son existence. Reposant sur le courant de pensée taôiste, le film distille charme et zénitude. Le travail de deuil est ici sublimé, l’harmonie entre humain et nature prend peu à peu le pas, la sagesse s’impose. Zoltan Mayer est un fin connaisseur de la Chine, au détour d’une scène, d’un cadrage, il met en valeur ce qui fait l’essence de sa culture, ses contrastes, son immensité territoriale et ethnique. Et que dire de Yolande Moreau ? De sa silhouette fantomatique et désabusée, elle domine ce drame par sa générosité, de sa grâce (il y a quelque chose de divin en elle) et son incroyable douceur mélancolique. Et quand elle sourie, c’est tout notre être qui est en émoi. Soulignons également le formidable travail sur la photo de George Lechaptois, ses lumières de la ville brumeuse, ou ses radiances autour de la nature donne une tonalité de réalisme, loin de tout cliché touristique. « Voyage en chine » est un film sans prétention, d’une surprenante simplicité même qui touche l’âme, le corps et l’esprit. MAGNIFIQUE !