Après un "Casino Royale" pas mauvais mais vraiment mal rythmé et un "Quantum of Solace" complètement paumé, Sam Mendes rattrape le flambeau au vol et réalise enfin un James Bond sûr de lui et dans la parfaite continuité de la série: Skyfall, l'épisode de rupture de la saga, l'épisode qui porte ses couilles. L'influence de Christopher Noaln se sent encore bien plus que dans les deux derniers opus, et c'est sans doute la meilleure chose qui aurait pu arriver à la saga. Daniel Craig campe ici un James Bond sur la fin, au service d'une M bonne pour la retraite (interprétée par une Judi Dench toujours aussi forte de caractère) alors que la situation du MI6 est au plus mal.
Cette gravité, c'est là toute la force de ce 007 fort de symbolique, enfin un épisode qui sert à quelque chose et ne se contente pas d'être un épisode de plus avec des péripéties en plus. Skyfall pose de réels questionnements sur l'obsolescence de nos protagonistes avec une certaine habileté dans sa mise en scène (notamment concernant le poème lors du procès, une scène particulièrement puissante) tout en proposant un nouveau départ pour la franchise, car oui, c'est encore possible après 23 épisodes. Le passé de Bond et le passé en général étant au centre du récit, le film s'amuse à distribuer plusieurs références aux années de gloire de Bond, suffisamment bien dosées et placées pour éviter d'être du fan-service grossier et gonflant. On notera entre autres une James Bond girl quasi absente, une Aston Martin qui a pris un coup de vieux, une épreuve d'entraînement très réussie et un nouveau joli petit Q (hu,hu) campé par un Ben Wishaw plein de charme. Dans ce même état d'esprit, la panoplie de gadgets est particulièrement sobre ce que le film assume et revendique ("Vous espériez un stylo à bille qui explose ? On ne donne plus trop dans ce genre de trucs". Un vrai régal...).
Par ailleurs le film accomplit l'exploit d'arriver à nous surprendre après déjà 50 ans de James Bond. On peut citer dans le tas un bad guy en quête de vengeance et de phallus calibre 50, qui lors d'une scène en particulier amène le spectateur à se questionner sur les orientations de Bond ce qui plaira ou pas aux fans, mais ne les laissera pas indifférents, ce qui est à saluer. Malheureusement et malgré le talent de Javier Bardem, cet antagoniste donne trop l'impression d'être un méchant classique du style de ceux qui ont toujours un coup d'avance, et a d'ailleurs tendance à tout prévoir un peu facilement. En deux mots, il surfe sur la vague du joker, l'influence Nolanienne a forcément quelques failles. Plus travaillé qu'un méchant standard de 007 mais toujours pas assez. Dommage, ceci dit il reste agréable et a droit à une ou deux scènes au-dessus du lot.
Dommage aussi que le film soit servi de plusieurs répliques un peu trop kitsch qui tranchent trop avec le côté serious business du reste. Même si à l'échelle du film, elles se font finalement plutôt discrètes.
Dommage enfin que même s'il s'en sort infiniment mieux que les deux derniers, le film accuse encore un certain problème de rythme, lors de son acte final seulement. Il n'empêche que le reste du film (qui dure tout de même 2h23) se regarde avec plaisir. C'est le plus long de la saga et pourtant les deux derniers donnaient bien plus cette désagréable impression de durer une demi-journée. Pour conclure, ce "007 Skyfall", en plus de rattraper habilement le four qu'était "Quantum of Solace", se révèle être un des meilleurs de la série et apporte une réelle volonté de nouveau départ, ce qu'il fait à mon sens le mieux possible.