Après une (trop) longue attente, la 23e mission de l’agent 007 arrive enfin sur grand écran… qui plus est, l’année des 50 ans de la saga (le film réserve d’ailleurs quelques clins d’œil aux anciens films, à commencer par le rôle joué par l’Aston Martin DB5). Et, bien que les producteurs nous aient habitué à prendre régulièrement des risques avec leur héros (le dernier exemple en date restant le reboot "Casino Royale"), ils parviennent encore à nous surprendre avec ce "Skyfall" qui restera comme le premier épisode de la saga à avoir bénéficier d’un réalisateur chevronné, davantage porté sur les films d’auteur, à savoir Sam Mendes. Rien d‘étonnant, dès lors, à ce que l’intrigue explore des sentiers inédits en présentant un Bond défaillant (l’excellent Daniel Craig dont le visage résume à lui seul toute la fatigue du personnage), laissé pour mort après une mission ratée, et qui peine à retrouver son niveau. Une situation inédite (et potentiellement perturbante pour les fans) que les scénaristes ont équilibré avec le retour des certains symboles indissociable de la saga mais abandonné depuis plusieurs années (Q et Moneypenny sont de retour ainsi que l’ancien bureau de M et les petites répliques assassines de Bond, la chanson-titre interprétée par Adèle retrouve le style des standards d’antan…). Il sera intéressant de voir le sort que réserveront les prochains épisodes à ces différents come-back, afin de s’assurer qu’après la remise à zéro "Casino Royale", ce "Skyfall" ne soit pas qu’un simple retour en arrière. Sam Mendes a également soigné la forme puisque chaque scène est filmé avec un soin tout particulier apporté aux décors et à la photographie… ce qui ce fait, parfois, au détriment de l’intrigue. A titre d’exemple, les scènes à Singapour (dont le duel entre tueur sur fond coloré ou l’arrivée au casino) sont davantage des œuvres d’art que des séquences indispensables au bon déroulement de l’intrigue. D’ailleurs, sur les 2h23 que dure "Skyfall" (un record !), une bonne vingtaine de minutes auraient pu être retirées lors de la première moitié du film. Car, si on peut regretter quelques longueurs (à commencer par la séquence prégénérique un peu trop classique malgré son dénouement), l’intrigue prend son envol avec l’arrivée du grand méchant de l’histoire, Silva (campé par un monstrueux Javier Bardem). Incontestablement cinglé, ce personnage évite le piège du ridicule auquel il semblait promis (voir sa coupe de cheveux et son attitude ambigu avec Bond) grâce à la mise en avant de ses traumatismes passées (Silva est complètement détruit intérieurement et extérieurement) et à sa quête d’amour filiale envers M. Il s’agit d’un des plus beaux coups du film puisque l’obsession de Silva est mis en parallèle avec la relation qu’entretient Bond avec M… au point que "Skyfall" pourrait se résumer par une lutte entre deux frères disputant l’amour de leur mère. Là encore, la présence de Mendes aux commandes n’est pas étrangère à la densité du scénario et permet à Silva d’entrer dans la galerie des meilleurs méchants de la saga. A l’inverse, on ne peut pas dire que les James Bond Girls marqueront les esprits et pour cause : l’héroïne principale n’est autre que M elle-même (Judi Dench toujours aussi parfaite). Concernant les deux autres Girls, Bérénice Marlohe n’apparaît pas suffisamment à l’écran pour convaincre ou pour décevoir et Noamie Harris réserve une belle surprise aux fans qui l’empêche d’être considérée comme une simple James Bond Girl. Le reste du casting ne manquera pas de surprendre puisqu’on retrouve les confirmés Ralph Fiennes, Albert Finney, Helen McCrory ou encore Ben Wishaw. Enfin, "Skyfall" nous réserve quelques séquences dantesques brillamment orchestrées par Mendes (l’affrontement sur l’île abandonné, l’évasion de Silva, l’attaque lors de l’audition de M, le final sur les terres de la famille Bond…). Ce 23e épisode est donc une grande cuvée (et devrait être le plus gros succès de la saga au vu des chiffres déjà réalisés)… ce qui ne l’empêche pas d’être moins réussi que l’indépassable "Casino Royale" qui a marqué à jamais l’univers Bond. Espérons que la prochaine mission de Bond ne fasse pas l’impasse sur l’organisation Quantum, au centre des deux épisodes précédents et dont le sort reste en suspens…