Le mécontentement quasi général à l'encontre du dernier Schumacher, me donne envie d'être plus conciliant dans ma critique. Car le réalisateur ne s'en sort pas si mal si l'on considère le scénario casse-gueule dont il a hérité. Le problème majeur tient en effet dans l'adaptation beaucoup trop littéraire du roman de Nick McDonell. L'histoire tient dans une simple tranche de vie d'une multitude de personnages, ce qui passe sans souci dans un roman ou même dans une série télé, mais qui convient difficilement à un long-métrage d'1h30. Le film débute sur une présentation très rapide des personnages (ce qui fait qu'on est un peu perdu au début), puis on commence à les voir évoluer pendant 3 jours (un peu court pour cerner quelqu'un), et tout à coup un final en queue de poisson (parce qu'il faut bien que ça se termine à un moment donné). A la fois il ne se passe pas grand chose, et en même tout va trop vite. Du coup, la voix-off, critiquée par beaucoup, s'impose comme un choix de narration presque obligé pour faire avancer rapidement l'histoire et passer d'un personnage à l'autre sans perdre le spectateur. Car là est le deuxième gros souci du film : beaucoup trop de protagonistes. Du coup, chacun d'entre eux n'est qu'effleuré, pas approfondi, et finit par se noyer dans la caricature. Seuls les personnages de White, Molly et Chris échappent à la règle, mais j'y reviendrai plus tard. Enfin, dernier problème, la multitude des thèmes abordés (jeunesse dorée, drogue, problèmes familiaux, deuil...) sans qu'aucun ne prenne le dessus sur les autres.
Schumacher et son scénariste n'auraient-ils pas mieux fait de se centrer sur le personnage de White, et de faire passer les problèmes de la jeunesse dorée et de la drogue en toile de fond ? Car White est bien le personnage le plus intéressant, représentation assez réaliste de ce que peut être une période de deuil. Habité par le souvenir de sa mère, comme "en manque" de celle-ci, il est moins vivant et plus paumé que les drogués qu'il côtoie. En devenant dealer, il devient, comme l'explique le film (oui, le film explique beaucoup... autre critique souvent lue...), le maître de la vie des autres, alors qu'il n'est plus maître de la sienne. Il leur permet de s'échapper de leur vie, voire de leur faire perdre cette vie qu'il a lui-même perdue. En tant que dealer, il côtoie à nouveau une classe sociale dont il ne fait plus partie, mais qu'il peut désormais dominer. Chace Crawford, dans ses nombreux non-dits, sait faire passer la profondeur de son personnage. Et tous ceux qui ressortent le classique "un beau gosse ne peut pas être un bon acteur", je les renvoie à un certain DiCaprio, très critiqué à ses débuts, et qui fait aujourd'hui partie des plus grands. Les deux autres personnages les plus marquants sont ceux d'Emma Roberts et Rory Culkin. Ils ne sont peut-être pas plus intéressants que les autres, mais leurs interprètes savent les faire sortir du lot.
La mise en scène de Schumacher est également très critiquée. Très stylisée, un peu prétentieuse, "bling-bling" comme j'ai pu le lire, finalement elle est à l'image du monde que dépeint le film. Le choix de Schumacher n'est donc pas si mauvais. Et puis, la photo est plutôt belle, donc ne boudons pas notre plaisir.
Sur le thème de la jeunesse (ici dorée) en péril, "Twelve" arrive peut-être un peu tard, tout ayant déjà été dit. Schumacher opte pour un trash assez chic. Ainsi, comme film sur la drogue, on a vu plus choquant et percutant, mais on n'est pas non plus ici dans le même univers que celui de "Requiem for a dream" ou "Trainspotting".
Pas exempt de défaut, mais pas un ratage complet, le "Twelve" de Schumacher avait peut-être juste un peu trop d'ambition, d'où un public dans l'ensemble déçu...