The assassin...... est une assassine.
Au IXeme siècle, le provinces marginales de la Chine sont plus ou moins en rébellion contre le pouvoir central de l'Empereur. Une famille princière se trouve, de par ses alliances, liée à la fois au pouvoir impérial et à la famille du gouverneur de la province de Weibo, le (très beau) Tian Ji'an (Chang Chen). Il a été fiancée à sa cousine Nie Yin-Niang (Shu Qui, un ravissant minois de chat) mais les fiançailles ont été rompues pour des raisons d'état. Yin-Niang a été élevée par une tante, une princesse nonne (Sheu Fang-Yi), fidèle au pouvoir impérial, qui l'a formée aux arts martiaux et l'envoie en mission: tuer Tian Ji'an.... Hélas, elle l'aime toujours.... Ajoutons que Tian Ji'an a une épouse (Jun Zhou) qui lui a donné trois enfants, et une concubine chérie, Huji (Nikki Hsin-Ying Hsieh), que madame Tian aimerait bien faire disparaître.
Voilà, vous savez tout. Tout pour rentrer dans le film, esthétiquement incroyable, de Hou Hsiao-Hsien, et de toutes façons, vous n 'y comprendrez rien. Le film est une succession de courts tableaux, tous plus beaux les uns que les autres, qu'il s'agisse de scènes d'intérieur éclairées à la flamme de bougies, ou de ces paysages sublimes des estampes chinoises, montagnes karstiques où s'accrochent des rubans de brume, lacs silencieux, pins torturés.... Les broderies des tuniques des hommes, les bijoux et les robes des femmes (qui rappellent les hanboks coréens), pas un détail qui ne soit admirable. Quant aux combats, ce sont des ballets merveilleusement chorégraphiés.
Mais vous n'y comprendrez rien. Toutes les femmes se ressemblent, ça doit être le style de Taiwan: jolis visages lisses et ronds, discrètement asiatiques, et vous mettez un certain temps avant de distinguer l'épouse de la concubine, par exemple; et en plus des personnages décrits ci dessus, vous verrez passer une joueuse de luth, un polisseur de miroirs, un sorcier spécialisé dans la magie noire, une (autre) justicière masquée..... Oumpf! Ce côté abscon, n'est ce pas un peu d'afféterie mal placée? Après tout, l'immense Kurozawa qui a été sans douté plus loin que nul autre dans la somptuosité visuelle n'éprouvait pas le besoin d'être obscur, en plus....
A voir pour tous les amateurs d'art chinois, parce que le film est en soi une œuvre d'art. Pour les seuls amateurs de cinéma..... moins sûr.