"Policier, Adjectif" est le deuxième long-métrage de Corneliu Porumboiu. Le cinéaste roumain déjoue les codes du film policier en mettant en scène la filature d'une histoire sans grand intérêt (des lycéens qui consomment du haschich), mais qui prend une tournure plus grave quand l'enjeu est de potentiellement mettre un des trois jeunes en prison. Le film suit l'enquête vaine de Cristi, jeune policier convaincu que les suspects n'y sont pour rien et conscient que la loi concernant la légalisation du haschich est sur le point de changer, qui ne trouve aucun élément permettant de disculper ces lycéens. Si la première filature montre avec patience l'inutilité d'une telle enquête, la seconde est redondante et menace l'ensemble de s'embourber dans une impasse. Mais "Policier, Adjectif" est un film plein de ressources, qui n'intercale pas ses scènes conjugales portées sur des discussions grammaticales par simple plaisir, mais qui utilise ces moments comme l'amorce d'un final où le jeu sur la langue devient politique. À la vision d'une formidable conclusion où l'utilisation du dictionnaire met en lumière des rapports de force inamovibles, le film dans son entièreté prend une dimension acerbe insoupçonnée. En lisant les définitions des mots demandés par son supérieur, Cristi est pris en piège par une manipulation arbitraire, mais il est aussi victime de sa mauvaise utilisation, voire de sa méconnaissance, des mots. En n'en connaissant pas toujours la portée et ne sachant pas comment les employer, à l'inverse de sa femme, c'est son engagement dans la police qui finit par se jouer : un choix qui ne relève non pas de réflexions liées à des compétences professionnelles mais une décision purement éthique, morale. C'est bien dans la nature de cette délibération qu'il faut percevoir toute l'intelligence du film.