Et ba mine de rien, se faire de temps à autre un titre d'un cinéaste de légende, ça fait du bien. « Cape et Poignard » n'est, certes, pas le plus grand film de son auteur, mais lorsque ce dernier s'appelle Fritz Lang, le mot « mineur » est évidemment à relativiser. Si le début est un peu banal, l'intelligence et le brio du réalisateur font vite la différence à travers une histoire mêlant habilement guerre et espionnage, photographiée dans un noir et blanc très sûr, multipliant les audaces, notamment dans la première partie, créant un habile suspense avec ce qui aurait été banal dans de très nombreuses mains. Je pense notamment à
l'assassinat de la scientifique
, excellemment filmée, la manière de renvoyer le héros à son statut de débutant dans le "métier", la rencontre entre Gary Cooper et Lilli Palmer, excellemment menée, ou encore cette paranoïa constante, justifiée ou pas (à ce titre, la scène du chat est à la fois l'une des plus touchantes et inquiétantes de l’œuvre). La seconde partie est sans doute un peu plus "routinière", mais non moins efficace, avec en point d'orgue ce
combat brutal entre Cooper et l'allemand
, dont la modernité étonne. Enfin, même si elle aussi devient plus classique sur la durée, l'échange au départ presque à fleurets mouchetés entre les deux héros ne manquant pas de saveur, la jolie Palmer en résistante prête à tous les sacrifices (mais non sans fragilités) n'ayant rien d'une jeune femme en détresse. Sans oublier un ultime rebondissement, légèrement prévisible, mais néanmoins percutant, malgré un dénouement efficace mais un tantinet optimiste, ce qui n'était visiblement pas prévu à la base. Du bon cinéma qui, sans atteindre la maestria de « Chasse à l'homme », a encore vraiment de quoi séduire aujourd'hui.