En Suisse l'aide au suicide est tolérée, si du moins la motivation de l'"aidant" est strictement altruiste. Le réalisateur français Olias Barco, en partant de ce point de droit, a bâti un scénario qu'il porte à l'écran pour un deuxième "long" renversant. Sa fiction dépasse largement la réalité helvétique : là où seulement des associations proposent leur aide à des malades en phase terminale, Barco imagine un suicide médicalement assisté, et même subventionné sur fonds d'état. Le Dr Krüger (Aurélien Recoing) a ouvert une clinique d'un genre particulier au coeur des montagnes suisses, où il accueille des candidats au suicide sélectionnés sur Internet. Certains de ses pensionnaires peuvent être cancéreux, mais beaucoup sont simplement dépressifs - il y a même un "addict" au sucide (Virgile Bramly, alias "Virgile"). Le suicide a un lourd coût "sociétal" (environ 1 million de morts par an, tous pays confondus), ce qui explique la prise en charge et la surveillance étatiques dans la Confédération façon Barco ; mais les risques de dérapage sont évidents, d'où la présence d'une inspectrice de la Brigade Financière (Vrginie Efira) enquêtant sur le docteur Krüger soupçonné par les autorités de se faire léguer des sommes importantes par ses "suicidés". Les autochtones sont également plus que méfiants vis-à-vis de cette clinique hors normes : ils vont en faire la démonstration éclatante en envoyant un incendiaire sur les lieux, puis en organisant une sanglante séance de ball-trap sur cibles vivantes. Ce "Kill me please" franco-belge est une sorte d'"objet filmique non identifié", un petit bijou d'humour noir, où il est question à tout moment de la mort (que l'on se donne et que l'on donne) sur un ton unique, encore au-delà du simplement décalé. A découvrir rapidement (grandes craintes de déprogrammation accélérée, c'est si spécial ! Pourtant, la - petite - salle où je l'ai vu hier était comble). Dans un noir et blanc de circonstance, Barco nous donne à voir une galerie pourtant très colorée de personnages remarquables. Outre les quelques noms déjà cités, on retrouve avec jubilation deux très grands de l'humour belge, si délectable : Benoit Poelvoorde (qui a les honneurs de la scène inaugurale) et Bouli Lanners, et on découvre d'autres "figures", spécialement dans le rôle de "Mme Rachel" la transsexuelle "Zazie de Paris". Il y a même, pour la touche "internationale", le Canadien Saul Rubinek, à la riche filmographie nord- américaine, cinéma et télévision, souvent de complément.