Je viens de voir ce soir le film à l'Espace St Michel. A priori, je n'étais pas trop le "coeur de cible" de ce type d'oeuvre. Noam Chomsky me servait de repoussoir parce que ce linguiste génial a parfois des retours de pensée qui m'inquiètent et, du côté d'Ignacio Ramonet, c'est le type qui m'a fait arrêté de lire Le Monde diplomatique, il y a déjà bien longtemps... Je crois en fait que je n'aurais jamais vu le film si je n'avais rencontré le réalisateur dans un festival en Allemagne il y a quelques mois, un gars brillant, "érudit sans se la péter", et très cordial. A ce moment là, je me suis inquiété: son film est peut être très bon et cela va être idéologiquement fatigant pour moi de retourner encore ma veste politique... Maintenant que j'ai vu le film, j'ai envie de reprendre, discrètement, la lecture d'un Monde diplomatique, écouter un peu plus les économistes "parallèles". Oncle Bernard qui officie dans Charlie Hebdo est tellement convaincant que je vais reprendre la lecture de Charlie, etc. Omar Aktouf est formidable dans son exposé sur la société ne créant plus que des "employables" et comment Victor Hugo ou Rimbaud seraient immédiatement recalés... Il me semble que le film est tellement bien affûté que, même si a priori on n'est pas trop dans la mouvance de ceux qui s'expriment, on est frappé par la pertinence de ce qui est dit. Cette pensée unique dont il est question dans le film, je sais qu'elle m'habite et cela m'a fait drôlement du bien de voir comment le conditionnement s'inscrit dans une longue histoire. Cela me rappelle la découverte des vaccins: le virus est d'abord bien décortiqué pour qu'ensuite on sache comment s'en préserver. Ce soir, la salle était comble, des personnes n'ont pas pu rentrer alors que l'on est déjà à une semaine de la sortie, la qualité du travail de cette oeuvre mérite bien que l'on s'y arrête un soir et que l'on ait envie qu'elle circule en "écrivant" autour de soi...