L'histoire... en fait je ne peux pas raconter l'histoire vu que c'est la surprise du chef pour ceux qui n'ont rien vu ou lu sur le film. Et comme je me suis bien fait avoir, je préfère que ça vous arrive également.
Le sujet est si fort et contemporain contrairement à l'affiche bien trompeuse que les acteurs sont obligés de donner le meilleur. Je ne venais que pour Keira et c'est un choc de la voir dans cet état, mais c'est surtout un choc que de voir cette science fiction « à rebours ».
Quelques personnes sont parties avant la fin, peut-être la lenteur du mélodrame à mouchoirs humides trop affirmé, sans doute la dureté du postulat. Et c'est hélas à nos portes grâce à un individualisme incroyablement égoïste et une société qui ne reconnaît même plus de droit à la vraie vie (la libre) à chacun. L'actualité commence à peine à sortir de son chapeau les premiers faits : même si le clonage n'est pas encore d'actualité, le bébé médicament l'est déjà, et dans le pays des droits de l'homme qui plus est, détail encore plus immonde.
C'est le premier film qui me fait regretter ma laïcité extrême, car tout ce que l'on voudrait devant cette horreur, c'est que l'homme revienne aux superstitions religieuses pour au moins ne pas instrumentaliser la vie a ce point. Qui plus est ans aucun consentement des intéressés.
Avoir développé toute cette science et ce progrès technologique pour que les hommes perdent définitivement toute éthique pour simplement ne réfléchir qu'à leur petite personne, peut-importe la souffrance des autres, c'est abject et déprimant.
Un esclave salarié chinois peut se barrer ailleurs ou se suicider, ce n'est pas le cas d'un clone médicament ou d'un bébé naturel du même type. Non seulement il ne peut changer de naissance et celle ci n'était pas gratuite, mais totalement pragmatique, bien plus que pour les allocations. Mais en plus il ne peut s'échapper, et c'est bien montré dans le film, car il serait toute sa vie avec le cas de conscience de ne pas faire le bien pour lequel il a été conçu. Bref, mourir ou s'enfuir, c'est passer pour un salaud et personne ne passe à l'acte. Ce sont les nouveaux martyrs de la science capitaliste à tendance sentimentale (quelle mère peut imaginer faire souffrir un autre enfant pour en sauver un premier. Il faut être élevé au soap opéra et à la presse people ou le roman de gare pour devenir à ce point inhumaine.
Par ailleurs, on peut s'interroger sur le parti pris intellectuel ou financier des professeurs qui participent à toute cette mafia, puisque des études commencent à montrer que touts les enfants éprouvettes ou les très grands prématurés souffrent à grande échelle de séquelles plus ou moins graves, mais toutes chroniques. Le progrès, comme dans le syndrome Sarko est souvent un effet d'annonce. On verra comment réagissent les patients qui bénéficient d'organes ou d'injections de médicaments « humains ». Bref, moins le sens de la vie devient compréhensible (si dieu n'existe plus et qu'il n'y a pas d'au delà) plus la soif de survivre à n'importe quel prix devient visible.
Les grands-mères qui font des gosses à 60 ans sont déjà une aberration psychologique (pour l'enfant, pour la mère on s'en doute), les mères qui mettent au monde des enfants médicaments ne donnent qu'une haute idée de leur égoïsme envers l'autre enfant. Mais si la raison est absente de toute cette folie, les cas de suicide chez les (très) jeunes qui sont malades (et les bébés médicaments vont sûrement les suivre si leur traitements sont trop lourds ou s'ils comprennent un jour leur seule utilité) vont peut-être remettre tout sur une voie plus éthique.
Une société qui ne peut affronter la mort ou la maladie en face, est en vérité bien peu courageuse. Et faire porter le coût de la guérison (relative et pas vraiment fiable sur la durée) sur un être humain non volontaire est proprement dégueulasse.
Ce scénario est magnifiquement déprimant, comporte plusieurs niveaux de lectures et utilise l'originalité de la science fiction du possible, à nos portes, et non celle moins dure du futur car moins tangible.
Mais le film anglais n'est pas à la hauteur de l'ambition japonaise. Lenteur, image moyenne, musique trop forcée, plans colorés foireux pour les transitions, budget à priori rachitique, trop d'ellipses, les points faibles sont nombreux et empêchent la catégorie chef d'œuvre.
C'est encore plus triste !