Honnêtement, le mec qui a fait ce film et ceux qui l'ont distribué et édité sont des gros malades.
En me laçant dans ce film, j'avais peur, pas peur de la durée exceptionnelle de quatre heures, ni de ce Sion Sono (ou Sono Sion chais pas) que je ne connaissais pas, ni de la mauvaise note de Aurea, ni du synopsis qui avait l'air con de chez con; j'avais peur d'un film trop subversif, d'un film trop loufoque, trop décalé qui me ferait vivre un moment bizarroïde auquel je n'adhérerai pas. Mais "Love Exposure" c'est typiquement le film que je n'aurai peut être jamais découvert sans SensCritique et mes humbles éclaireurs qui semblent presque tous s'extasier devant.
Finalement, au grand dam de Sergio Leone ou d'un dimanche matin, je n'ai jamais vu quatre heures défiler aussi vite de ma vie. C'est dingue de penser que "Love Exposure" dure vraiment quatre heures, quatre heures c'est quand même le temps qu'on met pour faire un Paris-Marseille en train, c'est une après midi entière, c'est deux fois le cours d'art appliqué le lundi soir (une horreur). Et pourtant devant "Love Exposure", on a ce sentiment qu'il n'y a aucune longueur, rien ne vient gâcher cette paisible (ou pas) ode à l'amour, cet acte de cinéma unique. La vérité c'est que "Love Exposure" est bel et bien une oeuvre décalée mais d"une richesse incroyable. Tout ça entre la religion, les culottes, l'érection, l'inceste, les lesbiennes, un poseur de bombe, un kidnappeur et la septième symphonie de Beethoven...Mais le film garde sa certaine clarté, ce qu'il raconte est magnifique, entre l'ode à l'amour, au rêve, à la folie, au sexe, le tout dans son déluge onirique somptueux, dans sa force, sa tension. On passe du rire (la bande qui s'entraine à photographier sous les jupes des filles en se prenant pour des super héros, les petites culottes...) à la haine de certains personnages, notamment cette petite garce qui va castrer son propre père.
"Love Exposure" c'est le film qui va nous faire passer des lesbiennes aux arts martiaux, de la religion à la secte, du virtuel à la vraie vie, du fétichisme à la grace. Le cadrage magnifiquement riche à chaque plan, les multiples émotions qui passent font du film un véritable tourbillons qui trouve son humanité lorsqu'il commence à parler d'amour. Sion ne tombe pas dans le piège de faire de l'absurde pour la jouer cool, il rend l'absurde incroyablement sublime, terriblement beau, et quand il le veut insoutenable. "Love Exposure" touche, bouscule, soulève des questions sur la religion, l'amour ... Mais le génie vient surtout du fait que en quatre heures, on ne distingue aucune perte de rythme, maintenir ce montage aussi jouissif pendant une aussi longue durée est un véritable prodige quand on voir la qualité du résultat final. De plus que le film se développe en deux partie totalement antonymes, il ne demande également aucune patience, distillant habilement et avec finesse ses différents thèmes et saveurs pour les réunir dans la symphonie finale à l'ahurissante beauté, et puis cette manière de filmé, "Love Exposure" est aussi beau qu'il est FOU ! Notamment rendu par des acteurs, certes un poil fébrile mais totalement dedans, donnant au film leur excitation permanente, une jeunesse absolue et insaisissable.
Avec "Love Exposure", Sono Sion fait de la poésie avec de la folie et de l'érection, l'érection en effet, c'est que devant Marie que ça arrive, sinon c'est cassé.