Pour qui aime l'Histoire et n'est pas danois, ce Royal Affair est, du point de vue didactique, tout à fait appréciable. D'ailleurs, il pourrait sans doute également ravir les danois, pour qui voir une parcelle de leur histoire ainsi mise en image aura j'imagine quelque chose de bien plus intime. Malgré tout, à l'image de bien des spectateurs européens, je ne savais rien du rôle déterminant joué par un médecin allemand épris de la reine du Danemark dans la transmission des idées des Lumières à ce pays précoce, souvent loué pour ses idées politiques et qui cherche sans doute ici, par la personne du réalisateur Nikolaj Arcel, à le mettre en avant. En cela, Royal Affair est un film historique de qualité, dont la mécanique didactique se déroule efficacement. Si quelques fautes visuelles (des tendances un peu trop mélodramatiques, notamment) surviennent de temps à autre, rien qui ne vienne réellement paralyser le cheminement tranquille de Royal Affair vers ses objectifs. Consensuelle certes, l'oeuvre cherche avant tout à ne pas venir trop gêner le déroulement du récit auquel cette sobriété, cette absence de fard, rend d'apparence tout à fait plausible vu de l'extérieur. Pour l’œil étranger, pas vraiment d'artifice, pas de surcharge dramatique, rien qui puisse laisser l'impression d'être trop retravaillé, donc possiblement écarté de l'Histoire. Tout cela fonctionne bien, et j'ai cru ferme à la vérité de ce qui m'a été raconté, tellement bien même que contrairement à d'habitude je n'irai pas chercher plus avant beaucoup de renseignements ou de précisions historiques, parce que je n'ai pas eu la sensation d'avoir été dupé. Maintenant, pour les moins, cette sobriété coupe d'office Royal Affair d'un réel souffle romanesque, et pour le Barry Lyndon moderne, on repassera. Néanmoins, Nikolaj Arcel peut s'appuyer sur trois excellents comédiens (solidement entourés, d'ailleurs). Mikkelsen est très bon, assez nuancé pour ne pas rendre son personnage agaçant, assez même pour en devenir intriguant. Plus surprenant pour moi qui ne les connaissait pas, les deux autres larrons du triangle "amoureux" sont également notables, à commencer par Alicia Vikander, crédible dans un rôle qui évolue pas mal, mais dont elle parvient à garder la maîtrise. Et puis Mikkel Boe Følsgaard est quant à lui excellent, jouant un roi dont il rend la schizophrénie unique, comme l'est sans doute chaque forme de ce trouble mental, tant il a sans doute su se débarrasser des clichés de jeu concernant le "fou" au cinéma, et préféré doter son personnage de traits singuliers petit à petit, empilant ces briques jusqu'à obtenir quelque chose de réellement humain avant tout. C'est vraiment, en tout cas, l'impression que j'ai eu en découvrant ce personnage, celui d'avoir affaire à une personnalité unique, tangible, cohérente dans ses incohérences, et pas juste un pion placé là pour faire avancer le scénario et simplement paraître déséquilibré. Tant mieux, car le dialogue permanent entre le Roi, la Reine et son amant est vraiment passionnant, loin de la banale bluette de soap opera, puisque viennent sans cesse s'y mêler des contradictions. Au final, Royal Affair n'est pas un grand film, loin s'en faut, mais une reconstitution soignée, enrichissante et agréable à suivre.