Je suis allée voir Inception hier, et je déclare, comme le papy à l'agonie: "deception".
Les incohérences narratives, d'une part, sont commodément noyées dans le principe d'ambigüité, sur lequel les spectateurs se reposent. Ainsi, on crie au génie sous prétexte que oulala c'est compliqué alors ça doit sûrement être vachement intelligent? A la limite, cela illustre le concept de l’idée comme virus : à force de dire que tous les détails ont du sens et soulèvent une nouvelle interprétation signalant le génie de Nolan, on finit par s’en convaincre. C’est triste.
Ensuite, j’ai du mal à comprendre l’enthousiasme général pour un film largement en deçà de son sujet : pénétrer les rêves, fantasme séculaire et universel, mais fantasme subversif ! Hormis quelques paysages réjouissants (Paris retourné sur lui-même, les maisons successives d’une vie alignées dans une même rue), rien n’est « impossible » dans ces rêves qui ont toute la convention et le réalisme de la réalité, en tout cas d’une réalité hollywoodienne comme le public en avale tous les jours : scènes d’actions divisant the good guys and the bad guys, amour, famille, enfants, politique, argent… Sous prétexte que la « violence » de l’affrontement a été déplacée de la réalité au royaume du rêve où les affrontements peuvent avoir lieu en toute impunité, Nolan fait de la violence du rêve un miroir plat et ennuyeux, ni concave ni convexe. Car où sont les scènes déformées par l’angoisse du dormeur, les monstres et les ombres du sommeil, la sexualité sans retenue ? Est-il vraiment plausible que dans un rêve, dans ce que les personnages appellent avec beaucoup d’auto-conviction le « subconscient », l’expression du désir sexuel ne se manifeste, entre les deux co-équipiers, que par un chaste baiser ?
Ah oui zut, c’est un film américain. Autant pour moi.
Deux critiques intéressantes de mon point de vue:
http://interlignage.fr/2010/07/inception-tourte-fourree-aux-cuisses-de-grenouille/
http://cdsonline.blog.lemonde.fr/2010/08/02/inception-asepsie-oui/