Revisitant la thématique Freudienne de l’exploration de l’inconscient par le rêve, Christopher Nolan imagine un univers science-fictionnel où six mercenaires d’un genre nouveau ayant le pouvoir de partager les mêmes rêves aux mêmes moments et d’interagir au sein de ceux-ci, conjuguent leurs forces pour modifier la réalité et satisfaire le désir d’un commanditaire.
Pour atteindre l’objectif assigné, implanter dans la tête de l’héritier d’une multinationale la conviction qu’il doit absolument démanteler sa propre entreprise, Cobb, le leader du groupe, va devoir s’entourer d’un petit essaim de rêveurs aptes à maitriser les arcanes et les surprises de l’inconscient : une jeune architecte, chargée de construire l’espace labyrinthique du rêve, un chimiste capable de formuler la substance déclenchant le « voyage » du groupe, un habile usurpateur d’identité pouvant se substituer au parrain de l’héritier pour influer sur ses décisions, un acolyte expert en armements et, pour finir, l’encombrant mais incontournable commanditaire.
Un tel scénario offre l’opportunité d’explorer aussi bien la symbolique du désir (la toupie de Cobb par exemple, dont la rotation parait incarner l’idéal d’un amour perpétuel pour son ex-épouse, Mal, alors que sa chute en fin de course signe le retour inexorable de la culpabilité) que la représentation d’architectures imaginaires (les rues de Paris se repliant sur elles-mêmes, l’escalier improbable de Penrose, ou encore l’opposition entre l’écrasante verticalité des édifices du premier niveau de rêve et les « falaises » de ruines urbaines se délitant dans l’océan des limbes) et l’on s’attend tout naturellement à une exploitation ambitieuse de cette veine. Or le traitement qu’en fait Nolan se révèle somme toute assez sommaire et décevant. L’influence lointaine de l’univers de Matrix (Wachowski), l’évocation de la scène finale de « 2001, l’Odyssée de l’Espace » ou des couloirs d’hôtel de « The Shining » (Kubrick), ne suffisent pas non plus à conférer à Inception le climat envoûtant et la portée « philosophique » de ces sources d’inspiration. Sans complexe, Nolan choisit plutôt d’inscrire son film dans l’ABC simplificateur des blockbusters hollywoodiens [Action, Baston, Compétition], le réduisant par là même à une pâle et laborieuse copie d’un James Bond. On ne s’étonnera donc pas que, passé la première demi-heure, le récit piétine et cahote vers un dénouement annoncé sans que le talent des acteurs ni la multiplication des effets spéciaux ne parviennent vraiment à susciter l’intérêt ou l’émotion.
Inception n’est pas à mes yeux une œuvre cinématographique à part entière, plutôt un produit marketing conforme aux standards et aux aspirations « hype » de l’époque. Il ne parait donc pas incongru qu’une partie non négligeable des internautes et des critiques contemporains le tienne pour un bon film.