Aurais-je fini par trouver l'épopée romantique parfaite?
Allergique à Juliette Binoche depuis plus ou moins le début de sa carrière (jalousie féminine peut-être?!), j'avais snobé ce film à sa sortie et au cours des 25 dernières années.
J'avais bien entendu vu l'épisode de Seinfeld où Elaine le ringardisait plus certainement que n'importe quelle critique assassine et je fuis les comédies romantiques comme un diabétique, la guimauve.
Bref, il aura fallu les hasards d'une chute pour, qu'immobilisée, je m'attaque à ce que je m'attendais être une pensum.
Eh bien j'avais tort! Je l'ai déjà regardé 5 ou 6 fois en moins d'une semaine, en épuisant méthodiquement les boîtes de mouchoirs à ma disposition.
Mais qu'en dire, sans trahir une intrigue déjà trop connue? Une photo (John Seale) hypnotique, une bande son (Gabriel Yared) d'anthologie, des comédiens époustouflants : Kristin Scott Thomas en tête, élégante, envoûtante, sensible et tout en retenue anglaise, Ralph Fiennes, habité, orgueilleux, mélancolique et sexy en diable, Colin Firth, l'"éternel mari", Naveen Andrews, conscience des « autres » peuples d'un empire britannique moribond, lieutenant lettré refusant l'ordre établi et oscillant entre douceur et colère, Willem Dafoe inquiétant et pathétique, Juliette Binoche…lumineuse en infirmière dévouée et volontaire.
Un casting parfait pour un (enfin deux) récits qui s’entrelacent dans une construction ciselée à l'or le plus fin (adaptation libre, inspirée du roman de Michael Ondaatje) et où se joue entre désert et Italie, guerre et paix, désirs et devoirs, espoirs et tragédies, trahisons et loyautés, fantômes et vivants, passé et présent, une tentative de réconciliation avec la vie.
Alors certes, le film du trop tôt disparu Anthony Minghella s'apparente à un mélo et il faut aimer - au moins un peu - ce genre formaté et déjà daté à la sortie du film, pour savourer pleinement une phrase comme "I know you'll come and carry me out in the palace of winds". Mais prononcée par K.,
alors que le comte Almasy porte, dans ses bras, son corps sans vie
, voilà une des déclarations les plus brûlantes qu'il m'ait été donné d'entendre au cinéma.
Loin de toute mièvrerie, clins d'oeil aux spectateurs ou facilité narrative, le Patient Anglais est un film aussi redoutablement intelligent et subtil dans la multiplicité des thèmes qu'il effleure avec délicatesse et des questions auxquelles ils se garde bien de répondre, que sensuel, épique et intimiste. Bref un chef d’œuvre authentique.