Lora Meredith, jeune mère célibataire, n'aspire à rien d'autre que devenir actrice. Quand elle rencontre Annie et sa fille Sarah Jane, sans domiciles toutes les deux, Lora accepte de les héberger. Le contact entre Susie, la fille de Lora, et Sarah Jane passe bien et c'est pourquoi les quatre femmes se retrouvent à habiter ensemble. Seulement voilà, Annie est noire et Sarah Jane, passant pour une blanche aux yeux de tous, vit mal le fait qu'on puisse la considérer comme une noire. Pendant ce temps, Lora voit sa carrière décoller mais au détriment de Steve, son grand amour et de sa fille Susie qui se retrouve élevée par Annie. Pas de doute c'est du grand mélo dont nous abreuve Douglas Sirk. C'est tellement mièvre, sirupeux et rempli de bons sentiments que ça dégouline de partout. Seulement voilà, le bonhomme sait y faire et filme mieux que personne ces histoires téléphonées dont tout le monde se moquerait si elles étaient au centre du téléfilm de l'après-midi de TF1. Ici, la beauté de la mise en scène et la pureté des sentiments sauvent l'ensemble. La force du propos aussi. Car nous sommes en 1959 et "Mirage de la vie" parle avec force du racisme sous-jacent rongeant l'Amérique. Il parle aussi des femmes qui rêvent d'indépendance. Lora, refusant de se marier avec Steve, pour mieux gérer sa carrière, en est un parfait exemple. C'est une femme qui s'émancipe, qui travaille. Mais à quel prix ? Le pauvre Steve fera le pied de grue pendant des années tandis que Susie ne verra que très rarement sa mère, trop occupée par sa carrière pour tomber amoureuse. Annie, elle, se démènera pour mener une vie décente, sans cesse rejetée par une Sarah Jane de plus en plus virulente, bien décidée à mener sa vie de jeune femme blanche telle qu'elle l'entend. Pour un film de son époque, "Mirage de la vie" est étonnamment moderne, abordant des thèmes qui sont d'ailleurs encore d'actualité aujourd'hui, notamment la place des femmes dans la société et le racisme. Et si le film est globalement réussi, porté par de belles interprétations, quelques chaudes larmes et un Eastmancolor magnifique, il n'empêche qu'il a parfois des allures d'éléphant dans un magasin de porcelaine. Le scénario n'a pas peur d'en faire beaucoup, développant des personnages un peu trop égoïstes pour qu'on s'y attache (cette gourde de Lora, tombant dans les bras de Steve avant de le rejeter pour un film) et des situations ultra-stéréotypées. Heureusement les acteurs jouent l'ensemble avec une bonne volonté féroce qui emporte le tout (pas facile de jouer au premier degré dans ce registre) et Sirk sublime l'ensemble avec son talent habituel, transformant cette mièvrerie totale en très beau film inoubliable.