Un couple qui respire le bonheur s'endort dans un hamac. Une maison "se promène" au milieu des paysages ensoleillés de l'Australie. Une petite fille rit en tout complicité avec son père. Le père meurt. L'enterrement est silencieux, personne ne pleure, car "c'est comme ça quand les gens sont vraiment tristes" explique la petite fille. L'âme du père aurait emménagé dans l'arbre qui borde la maison. Julie Bertucelli impose rapidement son atmosphère : une douce mélancolie, de la tendresse et de la poésie, sans sombrer dans le mélodrame larmoyant. Et c'est tout à son honneur. Julie Bertuccelli utilise l'arbre pour transposer à l'image ce qui se passe dans la tête des personnages. Tout en finesse, les tête-à-tête entre l'arbre et la fille, ou la mère, ou encore le deuxième fils, sont les plus belles scènes du film, et font passer bien plus de choses que tous les dialogues du monde.
Mais l'utilisation de cet arbre est aussi un obstacle à l'émotion. Julie Bertuccelli en fait un outil de métaphore sur le deuil, qui finit par envahir le film. Faut-il abattre l'arbre qui finit par mettre la famille en péril ? Autrement dit, peut-on recommencer à vivre ? A-t-on le droit ? Non pas que toutes ces questions ne soient pas intéressantes et ne soit pas propres à ce que ressentent les personnages, mais Julie Bertuccelli finit par plus se concentrer sur la destinée de l'arbre, et donc sur ses métaphores, plutôt que sur les véritables émotions de ces personnages. De plus, la fin (attention SPOILER) est ambiguë. En regardant le film, je l'ai vue, comme un retour à la vie de toute la famille. La petite Simone finit par lâcher l'arbre (et donc décide de revivre) en n'emportant avec elle que sa montre (elle en garde le souvenir). L'arbre finit par se déraciner, comme si le père décidait pour la famille, et les enfants replanteront une jeune pousse comme le symbole de leur renaissance, dans laquelle leur père aura toujours une place. La famille s'en va ensuite redémarrer sa vie ailleurs. Mais en y réfléchissant, on peut aussi voir dans cet arbre qui s'abat sur la maison, le souvenir tellement fort du père qui finit par détruire complétement la famille, et notamment la mère qui refusera son histoire d'amour naissante pour ne rester qu'avec ses enfants (dernier plan du film). Personnellement, la première version me convient mieux (c'est surement pour ça que c'est ce que j'ai ressenti en voyant le film), mais je crains que la réalisatrice ait choisi la seconde.
Si Julie Bertuccelli s'attarde sur ces réflexions, en oubliant un peu la pure émotion, les acteurs (enfin surtout les actrices) nous rattrapent du côté des sentiments. Charlotte Gainsbourg et "sa fille" Morgana Davies sont bouleversantes. Pour la première, on n'en doutait pas, étant l'une des meilleures actrices de sa génération, mais pour la seconde c'est une révélation. Rarement, une enfant nous aura autant touchés au cinéma, et rien que pour ça le film vaut le détour.