Rottweiler souffre d’une image désastreuse dans à peu près toutes les critiques que j’ai pu lire, si bien que je retardais le visionnage de ce film, pourtant curieux de voir ce que Yuzna pouvait faire. Finalement je me suis lancé, et le résultat est loin d’être aussi catastrophique que cela.
L’interprétation est plutôt bonne. Certes ce n’est pas d’un niveau démentiel, mais enfin William Miller est honorable dans le rôle principal. Il est investi visiblement, offrant des moments intenses, et il arrive franchement à convaincre dans l’ensemble avec des dialogues peu nombreux. A ses cotés, un casting de qualité, avec Irene Montala et Paulina Galvez qui n’ont certes pas grand-chose à faire, mais jouent elles aussi convenablement. Il y a encore, dans un second rôle, la talentueuse Ivana Baquero, qui devait se révéler plus tard. Le point négatif vient surtout de Lluis Homar, trop caricatural et grandiloquent dans le rôle du méchant de service.
Le scénario par contre, c’est vrai, c’est du n’importe quoi. L’histoire débute sur les chapeaux de roue et promet un survival sympathique, mais au final Yuzna s’égare. Le film multiplie les flash-back hasardeux car s’intégrant fort mal au reste du film et noyant complètement sa nervosité et son intensité, mais en plus il y a des moments hallucinatoires redondants et lourdingues. Si le rythme est plutôt soutenu, contrairement à ce que souligne certaines critiques, en revanche c’est vrai que le film est trop haché, trop saccadé, et à force de jouer avec sa narration il finit par se bruler les doigts. C’est dommage. Pour le reste l’histoire n’offre pas de grandes surprises, en dehors d’une fin peut-être inattendue.
Visuellement, le résultat est inégal. La mise en scène est plutôt correcte. Yuzna a de l’expérience, et livre un travail assez propre, notamment lors de la course-poursuite entre le monstre et Dante. Il y a de beaux plans, et quelques audaces de cadrage dont le réalisateur a le secret. La photographie est élégante. Cela m’a surpris compte tenu des critiques qui généralement ne le soulignaient jamais. Les contrastes sont très plaisants, il y a une grande variété d’ambiances et de coloris, et cela donne à Rottweiler un indéniable cachet. Les décors pour leur part son tout à fait honorables. Maintenant il est clair qu’avec son budget se sont surtout les décors naturels qui sont efficaces, le reste étant très sobre, et l’ambiance futuriste n’apparaissant jamais. Coté effets spéciaux, Rottweiler livre des effets horrifiques très réussis. Ils sont assez nombreux et sanglants. Les amateurs trouveront là une matière tout à fait honorable, au gré d’attaques répétitives mais bien faites. Il y a quelques scènes cruelles par ailleurs. En revanche, les effets spéciaux numériques sont bien mauvais, avec des incrustations plus qu’hasardeuses, mais c’est surtout problématique sur la fin. Pour terminer, la musique est la grande absente de ce film, n’ayant bénéficié d’aucune attention.
En conclusion, Rottweiler n’est pas le désastre annoncé par tant de critiques que je renvoie à leurs chères études, c'est-à-dire Asylum et Nu Image (Mattei ou DeCotteau pour les connaisseurs). Yuzna est certes loin de ses meilleures œuvres, et Rottweiler ne marquera pas les esprits, mais il est un divertissement honorable, sanglant et généreux. Dommage que son scénario soit aussi bâclé, car c’est là le défaut le plus conséquent. Je lui donne 3.
PS : la pétition lancée par les amoureux des animaux (fanatiques ?) concernant le film est d’un ridicule achevé. Doit-on pétitionner contre Sacré Graal à cause de la mauvaise image qu’il donne du lapin blanc ?