Précision de coutume pour commencer. Le cinéma de Baz Luhrmann, pour ceux qui apprécient son travail, n’est pas le cinéaste à refaire forcément un remake de L’Aurore. En gros, on aime ou déteste son travail, qui d’ailleurs est à un film près (Australia) quasiment toujours le même. Narrer une histoire d’amour impossible entre deux êtres que tout oppose socialement.
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La recette du réalisateur australien est quasiment la même, un début survolté (immonde d’ailleurs, comme à l’époque) où chaque plan des 10 premières minutes ne dépasse pas les 2 secondes maximum. Ce qui passait déjà mal dans Roméo & Juliet ne fonctionne pas mieux aujourd’hui. Dès ces premières minutes le réalisateur confirme ses limites. Il ne sait pas utiliser son décor et découper ses scènes, ne sait pas prendre son temps, Luhrmann ‘s touch c’est du show ! C’est donc par le même cache misère d’époque qu’il introduit son film. Tout débutait assez mal. Très vite on comprend également que la bande son sera là pour illustrer des séquences clippées. Soundtrack « hyper » produite avec singles en mode « repeat », et bien sûr le single « Young and beautiful » de Lana Del Rey (pas si mauvais au demeurant) répond à « Kissing you » de Des’ree pour l’adaptation shakespearienne.
La direction d’acteurs ? théâtrale comme dans tous ses films. Surjouée mais pas forcément ridicule une fois le concept adopté. Les scènes de « danses » sont brillantes, fastueuses, chorégraphiées au millimètre, ornées de couleurs et lumières qui en mettent plein les yeux. L’histoire ? même schéma que dans ses autres films. Une scène d’un théâtre près d’une plage en 1996 répond aussi à un immense échafaudage publicitaire dans une mine, toujours à ciel ouvert. Presque un remake.
Recette donc connue et éculée, on passera sur le parallèle qu’on aurait pu faire avec Moulin Rouge.
Mais en adaptant le roman de Fitzgerald ce n’est pas la critique sociale de l’époque qui intéresse le réalisateur mais la propension du récit à lui laisser libre cours pour nous raconter ce qu’il nous a déjà proposé.
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Non Gatsby n’est pas la purge annoncée, ce n’est pas non plus le film respectueux de l’œuvre originale qu’il adapte. On ne s’attendait pas à ça de la part du réalisateur. C’est avant tout un film séduisant graphiquement, avec une 3D assez soignée et très immersive où les comédiens réussissent à procurer des émotions au spectateur venu chercher les fruits du romance très légère.
Leonardo DiCaprio fait cependant le minimum, on en attendait peut-être un peu plus de sa part, plus de subtilité après la haute performance de Django. Celle qui sort donc son épingle du jeu, c’est Carey Mulligan, qui va finir par être indispensable au 7ème art si elle continue de dégager autant de charme en parallèle de compositions toujours justes.
Gatsby est finalement le parfait résultat de sa mise en production. Un film paillette, visuel et sonore (trop !), bardé d’émotions, glamours, d’amours impossibles, qui cible un public large mais précis. Probablement plus jeune avec les mêmes défauts et la même réussite que son prédécesseur d’il y a presque 18 ans. Une vingtaine d’années où chacun a su faire grandir ses goûts et son rapport au cinéma ; c’est avec cette réponse qu’il convient de rentrer en salle pour accepter ou non la proposition de Baz Luhrmann, en version 2.0 cette fois. A défaut d’être admirable et magnifique, Gatsby invite au moins à passer une belle soirée éphémère en sa compagnie, accompagnée de la petite gueule de bois des lendemains de fête. Entre euphorie et oubli.