Avec ces plans et prises de vue pour le moins moderne, et cette bande-son définitivement anachronique, l'adaptation de Gatsby par Luhrmann avait de quoi me rebuter de prime à bord, mais une fois plongée dans cette ivresse bourgeoise, mes doutes se sont rapidement envolés. Quel délice, quelle fraîcheur dans ce désenchantement bourgeois
(cette incroyable passage que j'ai adoré lire et qui a été magnifiquement illustré, où Gatsby dévoile une miriade de chemises, tantôt en soie, tantôt en flanelle, tantôt en brocart, et dans ce spectacle de couleurs de toute beauté, la pauvre Daisy qui éclate en sanglots "C'est si beau"; d'un ridicule attendrissant)
!
Quoi qu'il en soit je ne vais pas sûrement pas me permettre une critique de l'intrigue car ce n'est point le but ici, et que je n'ai par ailleurs jamais terminé le chef d'oeuvre de Fitzgerald; mais bon, à quoi bon se plaindre de l'aveuglement de Gatsby, de la transparence de Nick ou de l'opportunisme de Daisy ? Ce n'est sûrement pas le but de Luhrmann ici, et vous auriez sûrement tort de ne retenir que cela du film.
Gatsby, c'est des stéréotypes caricaturaux mis au service d'une accusation pour le moins acrimonieuse de notre société. Rien de nouveau sous le Soleil donc. En effet que ce soit durant les roaring twenties ou aujourd'hui, rien n'a vraiment changé. Je vais même me permettre un parallèle provocateur -vous m'excuserez-, mais les scènes de fêtes et d'ivresse m'ont rappelé par bien des aspects Projet X (hé oui j'ai osé). On est toujours dans cette thématique de la fuite en avant dans l'opulence et la fête, cette tendance définitive à l'ostentatoire, qui nous dévoile les vices et faiblesses de cette nouvelle génération (d'après guerre). Et c'est ici que le personnage de Gatsby fait mouche. Ce pauvre vieux n'a vraisemblablement rien à faire ici, et pour reprendre les termes de ce cher Nick "Vous valez mieux que toute cette racaille". Et c'est bien vrai, Gatsby fait figure d'ange déchu dans cette orgie d'opulence, de blingbling et de fausseté. La mise en scène est d'autant plus magnifique que la critique de cette société en est acerbe. Sincèrement, j'ai vu énormément de films, mais ce Gatsby là m'en a vraiment mis "plein les mirettes", un véritable orgasme visuel. Certains pourront mettre sur le compte du mauvais goût et du blasphème l'utilisation du rap u.s à tout bout de champ pour ponctuer tantôt l'étourdissement, tantôt l'hystérie new yorkaise - pour tout vous dire j'ai retenu un pouffement de rire en entendant les premières notes de "No church in the wild" accompagné de la voix off de Nick- Fitzgerald s'en retournerait dans sa tombe. Mais selon moi il s'agit vraisemblablement d'un coup de maître, pour ne pas dire de génie, comme si notre rap U.S à nous rentrait en résonance avec l'essor du Jazz à cette époque-ci.
J'ai fallu oublier de parler de casting, lapsus révélateur puisque pour tout vous dire il ne m'a pas vraiment marqué, et c'est peut être la faiblesse de film, avec tant d'artifices que le casting fait pâle figure. Bien sûr Di Caprio est au rendez-vous, mais ce n'est vraiment pas renversant, pas à la hauteur de la mise en scène en tout cas. e manque de présence (en même temps c'est le rôle qui veut ça), et an est à aucun moment crédible dans le rôle de la princesse gracieuse et torturée.
En tout état de cause, loin de tomber en désuétude, le Mythe de Gatsby n'a jamais autant été d'actualité, grâce à ce vieux frère de Luhrmann qui a su le remettre au goût du jour ! Je ne saurais comment trop vous dire d'y jeter un coup d'oeil, voire deux, ne serait-ce que pour l'expérience visuelle et auditive offerte.