Un exceptionnel chef d'oeuvre scandaleusement sous-estimé alors qu'il frôle la perfection sur tous les plans. Pour beaucoup, "JFK" est avant tout la présentation d'une théorie sur l'assassinat du Président Kennedy (tiré du livre "JFK, affaire non classée" du Procureur Garrison), innocentant Lee Harvey Oswald et mettant en cause la CIA, le FBI, la Mafia, le Vice-Président Johnson... c'est à dire une thèse dont certains aspects peuvent être discutés mais qui a le mérite d'être diablement séduisante. Pour autant, "JFK" aurait pu n'être qu'une honnête reconstitution de l'enquête sur la mort de Kennedy, se rapprochant plus du documentaire que du film. C'était sans compter sur le talent d'Oliver Stone, réalisateur certes inégal mais qui touche l'excellence ici en transcendant les règles de la mise en scène. Car Stone a parfaitement compris qu'il devait apporter une valeur ajoutée à son histoire et c'est peu dire qu'il a particulièrement soigné sa réalisation. Entre les flash-backs, les séquences en noir et blanc, les ralentis, les images d'archives (particulièrement impressionnantes), le tout asséné avec des ruptures de rythme effarantes pour ce genre de production, le réalisateur prend le spectateur à la gorge, en l'abreuvant d'images et de révélations inconnues du grand public... sans, pour autant, lui donner l'impression d’assister à une reconstitution judiciaire. Certes, Stone défend, bec et ongles, la thèse de Garrison, mais il n'oublie pas l'humain derrière le drame historique sans pour autant alourdir son récit. La complexité des personnages, les petites histoires parallèles (la vie de famille du Procureur Garrison, le fonctionnement de son équipe...) mais également la mise en avant de l'impact de l'assassinat sur la vie des Américains viennent renforcer l'enquête grâce à une savante mise en perspective. On assiste pas seulement à un procès mais bien à un tournant de l'Histoire des USA et à une proposition de réponse particulièrement tentante à l'une des questions les plus mystérieuses qui soit ("qui a tué Kennedy ?"). Stone a, également, su magnifier cette page historique à grands coups de BO grandiloquente (John Williams à la baguette) et de photo léchée... et réussit l'exploit de faire oublier la durée du film (plus de 3h). "JFK" est donc un véritable tuerie sur le plan de la mise en scène, puisqu'il se montre respectueux de son sujet sans sombrer dans l'académisme primaire, tout en s'autorisant des fulgurances visuelles épatantes. Certaines séquences sont, d'ailleurs extraordinaires, à commencer par la fameuse scène du parc où le Procureur Garrison va se faire expliquer les tenants et les aboutissants de l'affaire par le mystérieux Mr X. Mais "JFK" bénéficie, également, d'un extraordinaire casting avec un Kevin Costner, formidable d'humanité et de droiture en Procureur intègre, l'excellent Gary Oldman dans le rôle difficile de Lee Harvey Oswald, un Tommy Lee Jones des plus ambigus, un Donald Sutherland fantastique en mystérieux informateur, un Joe Pesci toujours aussi hystérique ainsi qu'une pléiade d'excellents 2nds rôles (Sissy Spacek, Jay O. Sanders, Michael Rooker, Kevin Bacon, Walter Matthau, Jack Lemmon, John Candy...). "JFK" est donc un très très grand film dont la longueur en a malheureusement rebuté plus d'un... à tort !