Film massacré par la critique et pas du tout attendu ni espéré par les fans du personnage éponyme, autant dire que ça sent pas bon au box office… Fallait-il faire ressurgir The Crow ? A mon avis ce n’était pas nécessaire, mais pourquoi pas ? Le souci c’est de faire oublier la version avec Brandon Lee, et ce film n’y arrive pas. Il y a de bonnes choses. Par exemple, Skarsgard est loin de démériter malgré son maquillage un peu foireux. Il a un physique félin, l’acteur s’emploie, on sent qu’il a à cœur de faire bien. En face de lui, Danny Huston, habitué aux rôles de méchant était tout indiqué comme antagoniste principal. Pour le reste, en revanche, c’est aléatoire. Laura Birn arrive à se faufiler pour se démarquer du côté des méchants et même voler la vedette à Huston sur la fin. Son personnage a un côté un peu plus ambigu que n’a pas le personnage de Huston qui en plus est terriblement mal exploité (j’y reviendrai). Bouajila n’en fait pas lourd, FKA Twigs n’est pas spécialement marquante, mais à la limite on peut croire au couple qu’elle forme avec Skarsgard. Par contre, le background sur son passé est franchement mal écrit.
Outre Skarsgard, le film propose 20 dernières minutes violentes, gores, radicales, qui sont plutôt bien fichues malgré un abus total de sang numérique qui finit par me saouler un peu dans les blockbusters actuels. Ils peuvent en mettre plein, le sang numérique se voit et ça retire l’aspect réaliste qu’on peut attendre d’une scène de baston. J’ai bien apprécié aussi la bande son du film, pas complètement originale, qui certes aurait pu être un peu plus travaillée mais fait globalement le travail.
Maintenant, le film a aussi pas mal de défauts. Déjà, si on a 20 mn de baston appréciables, on a une très longue première partie où il s’agit surtout d’une romance ! Une romance un peu borderline, entre deux paumés, donc pas trop fleur bleue, mais une romance quand même, avec très peu d’action, pas de violence, et qui en plus mène à la scène clé du film qui est complètement bazardée ! Je ne comprends pas pourquoi le film s’attarde autant sur les gazouillis des tourtereaux pour bazarder en 30 secondes la raison même du personnage de The Crow ! Quand on se rappelle Darkman, Robocop, le premier The Crow, on ne peut qu’être déçu de ce spectacle, à fortiori alors que le film balance du gore par la suite. Enfin, je dois ajouter que Huston est hyper mal employé et que le combat final est une franche déception. Je n’ai pas compris pourquoi introduire un personnage de ce genre pour en faire, au final, si peu de choses.
Le film a donc un problème de rythme inégal, d’idées peu exploitées, et de moments clés mis en retrait par rapport à des idées nouvelles souvent sirupeuses et en plus très bizarres (c’est quoi cette prison mixte aux costumes roses dans un The Crow ?). Par ailleurs, même si l’idée d’effacer le concept de vengeance au profit d’un autre était audacieux, il ne change au fond pas grand-chose à un problème qui m’a toujours dérangé dans The Crow : l’invulnérabilité du personnage gâche forcément le suspense. Darkman est humain, Robocop est destructible, ça crée une tension supplémentaire. The Crow non. Alors le film introduit une idée au début qui aurait pu changer la donne, mais comme dans l’épilogue ça ne sert à rien, en définitive c’est frustrant.
Formellement, outre le sang numérique décevant, le film peine à installer une ambiance. Il y a deux raisons : la première est que le film n’a pas su choisir. Il lorgne un peu vers le gothique par moment, un peu vers le film noir d’autres fois, on sent les influences de Batman, de Joker, il y a un peu de John Wick, un peu de Kill Bill, le réalisateur n’a pas d’identité visuelle marquée comme Proyas et le film s’en ressent. Pas vilain en soit, il manque de personnalité, et ça devient un défaut dès lors qu’on arrive dans des lieux comme le Purgatoire qui ressemble vraiment à rien ! De manière générale les décors sont faibles, l’ambiance manque de poisseux, même les corbeaux sont trop discrets.
En conclusion, The Crow est un film dispensable. Pas complètement foiré, plutôt divertissant une fois qu’il se lance vraiment (mais tardivement), il se laisse voir, mais n’a pas vraiment d’âme et n’exploite pas ce qu’il amène tout en délaissant ce qui existait déjà. 2