Un très beau film encore de Julio Medem qui confirme sa singularité, avec son cinéma très original. Toujours ce mélange bien dosé d’esthétisme, de fantastique et de poésie. Ici le scénario parait bien faible sur le papier et on craint le pire , un huis clos dans une chambre d’hôtel à Rome ,pour un couple qui vient juste de se rencontrer ,et qui va passer sa 1ere nuit ensemble, accessoirement il s’agit de deux femmes. On se demande comment Medem va arriver à « animer une intrigue », au delà de l’aventure érotique potentielle.. Et puis très vite, il nous capte, il nous envoute, il nous entraine , mêlant la poésie, le fantastique , l’illusion et l’érotisme. Car le récit va se jouer à plusieurs niveaux . Tout d’abord le mystère, car les deux héroïnes qui ne se connaissent pas, vont se raconter pendant cette nuit, mais avec beaucoup de mensonges et de fantasmagorie. Il y a une peur de chaque côté de trop se dévoiler, de livrer des secrets. L’espagnole est lesbienne et veut conquérir la belle russe qui est hétéro. Pour se faire elle se construit un scénario rocambolesque, d’une « fausse vie » qui évoluera au cours de la soirée. De même pour la belle russe, tout juste fiancée, qui prépare ses noces , qui ne veut pas se dévoiler et entretiendra un mystère autour d’une sœur jumelle hypothétique. . Leurs récits s’enchaînent et se modifient au fil de la nuit et de l’évolution de l’amour passion qui monte en elles, elles feront l’amour, se découvrent, mais hésitent à se confier, car au petit matin elles veulent reprendre leur vie respective.. Et puis il y a un tout un jeu pictural et poétique, dans la belle chambre de ce Palazzo il y a des tableaux romantiques avec des scènes classiques qui représentent des personnages de la mythologie importants, qui eux même renvoient aux histoires racontés par les filles. On est encore comme dans un roman Borgésien , avec des jeux de miroirs et de labyrinthes. Tout cela est entrecoupée par les relations amoureuses saphiques, l’Ukrainienne découvrant tous les variations de plaisirs lesbiens possibles.. Les deux filles sont superbes, un corps sec, et svelte pour l’espagnole et un magnifique corps tout en rondeur pour l’ Ukrainienne. Le sexe est beau, bien filmé, très esthétique. L’image est très soignée, avec des tons , très italiens renaissance, proche de la peinture florentine, et des cadrages magnifiques très picturaux, très photographique. L’histoire de cette passion d’une nuit a du sens , et Medem nous régale d’un film très original.