Il fait pourtant toujours un peu peur ce « cinéma d'auteur à la française », l'idée que l'on s'ennuie ferme n'étant jamais très loin. Pourtant, c'est bel et bien le mot « plaisir » que l'on a à la bouche en sortant de la salle, ravi d'avoir vu un spectacle avec des caractéristiques devenues si rares au cinéma : bouillonnant, vivant, émouvant... Bien entendu c'est cette peinture du music-hall qui nous séduit le plus, que ce soit dans la manière de le filmer, de l'aimer que nous propose Amalric, plongée dans des couleurs délicieuses et chatoyantes, sans jamais tomber d'une quelconque manière dans l'illustration un peu vaine. On est au contraire terriblement séduits par ces femmes à la fois très différentes et identiques, loin d'être dépourvues de personnalité, mais surtout là encore tellement vivantes, tellement réjouissantes dans leur manière de s'exprimer, de « vivre »... Mais si « Tournée » est donc bien entendu avant tout un film sur le music-hall, il n'en demeure pas moins un beau portrait d'homme également, loin d'être parfait (pour ne pas dire énervant parfois), mais lui aussi tellement attachant. C'est peut-être aussi cette manière qu'a Amalric de filmer a priori un univers très précis pour finalement le transformer en endroit universel, où chacun a envie, ne serait-ce que pendant quelques heures, de faire partie du spectacle, de le vivre en tout cas auprès de ces personnes hors du commun. Dommage toutefois que le film se perde un peu en route dans la dernière demie-heure, Amalric semblant alors ne plus trop se donner la peine de raconter quoi que ce soit mais simplement de prendre une « pose » d'auteur ne lui allant vraiment qu'à moitié, mais qu'importe : entre scènes magnifiques (la rencontre avec la guichetière d'une station d'essence : exceptionnelle), personnages croustillants et numéros à tomber, « Tournée » s'impose aisément comme l'un des incontournables de l'année 2010. Merci, M. Amalric.