Encensé par la critique lors de sa projection cannoise, récompensé lors du palmarès, Tournée fait d'emblée partie de ces films dont on attend beaucoup. Beaucoup quoi ? Un ravissement ? Une enchantement ? Une claque ? De la fameuse tournée, on voit peu de choses, comprenant rapidement qu'elle n'ira pas bien loin. Du plaisir de la scène, de l'intimité des coulisses, de l'indépendance des danseuses "New Burlesque", on ressent la passion, l'odeur des fards, la texture des maquillages. Le film montre et explique peu, bon point pour Amalric, d'autant que lorsqu'il explique la lourdeur est immédiate (la scène de la chambre d'hôpital est à ce titre digne du plus mauvais théâtre). D'ailleurs les scènes parisiennes, celles censées nous éclairer sur le passé de Joachim, n'ont en réalité aucun intérêt. Amalric aurait pu (et aurait dû) s'en dispenser. Comme le dit son personnage, c'est dans l'instant présent que son film doit se vivre, oubliant le passé au passage. Le film se déguste donc comme une longue promenade en compagnie de danseuses à fort caractère, et de cet homme (raté, brisé, pourri ? On ne le sait pas vraiment et on s'en moque), admiratif de ces femmes détenant le pouvoir, pouvoir de leurs corps, pouvoir de la scène, pouvoir des hommes. Quelques très jolies scènes (la station service, le fils au commissariat, la baise dans les chiottes) à la fois légères et pesantes, toutes très justes. La mise en scène sait allier rythme et élégance, l'image, souvent très belle, est à la fois pudique et sensuelle (très joli plan d'une des danseuses se lavant les pieds dans la baignoire). Au final, un joli film imparfait mais tendre dont la fin ouverte nous invite à d'autres ailleurs comme le pollen se perdant dans le vent...