Old Boy, le chef d’œuvre coréen de Park est sujet au remake Outre-Atlantique. Le projet est hautement casse-gueule et c’est Spike Lee qui s’en charge. Pour autant, peu importe le cinéaste derrière cette relecture, il semblait impossible de rivaliser avec l’original, pour rappel, adaptation d’un manga. Et en effet, le résultat n’est que peu probant. Oh, pour ceux qui auraient omis le visionnage du film sud-coréen, le travail de Spike Lee pourra paraître très intéressant, son film étant, globalement, similaire, dans l’esprit, au modèle. Quoiqu’il en soit, alors que Park brillait littéralement, autant narrativement qu’esthétiquement, Spike Lee ne semble pouvoir réellement saisir l’âme du récit, surfant sur la vague en voulant délivrer à son Amérique sa vision d’un classique du cinéma malheureusement méconnu aux USA.
Si le résultat n’est pas catastrophique, on n’en est loin malgré les foudres de la critique, c’est surtout du fait de l’investissement de Josh Brolin, acteur impeccable qui évolue ici, le teint blafard, tel un mort de retour parmi les siens. Certes, la version US du bonhomme n’est pas égal à la version coréenne, mais l’acteur solide derrière la carrure impressionnante de Joe, est excellent, dans un genre tout particulier. Le jeune Elizabeth Olsen, elle aussi, est très bien entrée dans son rôle, à l’inverse, malheureusement, de Charlto Colpey, le méchant du moment. Surjouant, guindé, l’acteur sud-africain n’est absolument pas le maillon fort du casting, et le final, artificiel, démontre que le bonhomme n’y était pas vraiment. Dommage dès lors qu’une telle inégalité dans le casting plombe l’atmosphère. Samuel L. Jackson n’y est pas non plus pour rien, lui qui patauge allègrement depuis maintenant 15 ans.
Bref, inutile de parler d’une déception, prenant en compte le fait que l’on attendait très peu du remake américain d’Old Boy. Les incohérences scénaristiques viennent également mettre de plomb dans l’aile d’un film qui aurait sincèrement mérité un bon quart d’heure supplémentaire. Est-ce le studio, le scénariste ou Spike Lee lui-même à qui l’on doit de drôle de coupes dans le montage? Oui, ici, le cinéaste semble passer sur la période d’incarcération de Joe, fait symbolique donnant le ton à une deuxième partie de film que le cinéaste aura malheureusement tendance à rapprocher au thriller traditionnel. En gros, si Park était parvenu à mélanger les genres, thriller, action et même film de baston, ici la scène de fight en plein couloir ne colle pas à l’ensemble, une énorme tâche en milieu de parcours, Spike Lee, lui, semble avancer à l’aveuglette, voulant sans doute trop recollé à l’opus copié.
Le comble est finalement que Spike Lee ait voulu rester trop fidèle au film coréen, de toute manière inimitable, la preuve en est avec de nombreuses références à l’univers asiatique. Il aurait été plus aisé, plus sain, même si certains n’auraient pas apprécié, que Spike Lee oriente son film vers une vision plus occidentale, plus indépendante, du récit initial. A vouloir respecter impérativement les codes initiés par Park, le cinéaste new-yorkais met les pieds dans le mauvais plat. Pour autant, Old Boy, version 2013, n’est pas foncièrement déplaisant, remplissant le cahier des charges pour un public qui n’est pas déjà influencé par l’œuvre originale. Tout sera pourtant vite oublié. 08/20