4sur5 Sitôt qu'un créateur de mode ou un publicitaire passe derrière la caméra, ce sont toujours les mêmes reproches : à l'instar, par exemple, du The Cell de Tarsem Singh, A Single Man, premier film du styliste Tom Ford, sera taxé de coquille vide à la beauté froide. Argument aussi artificiel que ce qu'il est censé dénigré [parce que, finalement, il se focalise plus encore sur la forme], mais tant pis. A Single Man est un film du présent qui se déroule dans les 60's. Il fait penser aux mélodrames de la grande tradition, sorte d'Eastwood en mode chic, de Douglas Sirk en mode pop. Les icônes y sont, les sosies de Bardot, de James Dean, on entend Gainsbourg, on n'y voit que des gens bien habillés, des visages warholiens, des femmes coiffées comme Deneuve ou Jackie Kennedy... Pourtant ce n'est pas un catalogue fâné, c'est un retour vers le futur désenchanté, un spleen idéalisé. Le spectacle du film, c'est Georges, l'homme du titre, l'homme célibataire, l'homme au singulier. Georges a perdu son compagnon, il s'agirait d'envisager à nouveau la vie. Mais Georges, ce Georges qu'il ne fait qu'interpréter, las, sobre et sans doute résigné, est déjà trop mort pour ça. D'ailleurs il joue avec le suicide, c'est son véritable péché mignon, son petit quart-d'heure d'égarement quotidien. Le film ne filtre plus que la beauté du quotidien. L'esthétisation sublime l'émotion, le naturel s'introduit dans la pub à rallonge. Il y a la vie grise et lisse de Georges, mais il y a aussi le parfum de la dernière fois. Des dernières fois, que le personnage investi mais sans allez jusqu'au bout de ses fantasmes, en tout cas sans les valider dans le réel. Ceux-là appartiennent déjà au passé, il se contentera des réminiscences, de savourer toutes les ébauches parfaites.