Johnnie To, un réalisateur de Hong Kongais, était pour moi un illustre inconnu jusqu’au visionnage de ce film, et j’aurai préféré qu’il le reste, tout comme le film d’ailleurs. Si vous laissez "Vengeance" de côté, vous ne perdrez rien, parce que Johnnie To se prend pour John Woo. Sauf qu’il n’en a pas le talent, ni probablement le budget. "Vengeance" est supposé être un film d’action, trépidant et percutant. Au lieu de ça, le rythme est horriblement freiné par un usage abusif de ralentis sensés esthétiser ces scènes. Pour couronner le tout, ces moments sont accompagnés du même thème musical, et ça finit par être redondant, jusqu'à enlever tout intérêt et tuer le suspense, déjà mis à mal par le titre. Car on sait déjà avant même les premières images qu’on va avoir droit à une énième histoire de vengeance. Le début est pourtant prometteur et nous met rapidement (pour ne pas dire directement) dans le bain en nous proposant une fenêtre de vie sur cette famille fraîchement réunie et vivant dans un visible bonheur. C’est juste après que la mise en scène se gâte : entre les dialogues édulcorés au possible, les scènes d’action au ralenti, et la même rengaine musicale, on a en prime une tenue des plus ringardes pour Johnny Hallyday dont le personnage est resté bloqué dans les années 50/60 avec son imper et le borsalino, ce qui le rend facilement repérable alors que son but devrait le pousser à se fondre dans la masse. Mais vu que Francis Costello est plus ou moins dans l’incapacité de discerner les choses, ça peut encore passer. Après tout, on ne demande pas à un tueur de réfléchir, mais d'éxécuter (sans faire de vilain jeu de mots). A cela on rajoute un certain nombre d’incohérences, comme le moment où le trio de tueurs à gages lui laisse la vie alors qu’ils viennent d’éliminer un couple illégitime pour le compte d’un chef de triade chinoise. Impensable alors que leur mode opératoire ne laisse rien au hasard. Le comble est dans la suite des événements, puisque Costello parvient à s’approcher de ce trio, afin de se faire aider à retrouver ceux qui constituent l’objet de sa vengeance. Ce même trio va même retourner sa veste contre leur propre patron sur de... simples promesses ! Si encore le scénario proposait quelques menues surprises, ça passerait encore. Au lieu de ça, c’est prévisible et l’ennui s’installe doucement devant cet étalage d’effets de style permanents, à tel point que l’histoire en est presque oubliée. Il nous reste alors le casting, avec notre Johnny national qu’on a connu plus inspiré, et ce n’est pas sa gueule qui sauvera grand-chose. Sylvie Testud ? Ses apparitions sont bien trop rares pour en donner un avis quelconque. Le seul qui parvient à peu près à tirer son épingle du jeu est Anthony Wong Chau-Sang, car il parvient à incarner l’idée exacte qu’on se fait d’un tel personnage caché derrière ses lunettes de soleil. Doté d’un certain charisme, il a la stature d’un homme de main. Ce bon point est à joindre à une photographie intéressante, mais ce n’est pas suffisant pour sauver "Vengeance" du naufrage dans cet océan de tension dramatique sans cesse grandissante.