Je suis allé voir ce film sans savoir à quoi m'attendre, d'autant que je ne connais pas ce réalisateur (il est vraiment bien Truman Capote ou juste sympa ?). Résultat j'ai vraiment bien aimé le film, faut dire que Brad Pitt fait partie de mes acteurs préférés du moment, on peut dire que les rôles qu'il a eu récemment sont taillés pour lui, même là où on ne l'attend pas (je pense notamment à The Tree of Life, je ne m'attendais pas à le voir dans un rôle autoritaire, voire très strict). Ici encore il a un rôle un peu sec, celui de Billy Beane, un ancien joueur de base-ball reconverti en recruteur pour l'équipe d'Oakland. Cette histoire vraie mérite clairement d'être racontée, car même lorsqu'on n'y connait rien dans le monde du sport il faut admettre que le parcours de cet américain force le respect. J'ai vraiment peur de ne rien comprendre au film, étant donné que je ne connais pratiquement pas les règles du base-ball et encore moins les termes compliqués qui vont avec. Et pourtant, Le Stratège (titre assez pourri soit dit en passant) est accessible à tous, mêmes aux ignares complets. Le film a un peu l'effet "Dr House", on ne comprend pas tout ce qu'ils disent mais on ressent leur impact et leur importance. Avec ce film, Bennett Miller nous embarque dans le monde de ce sport très populaire aux USA, et notamment toutes ses coulisses en matière de financement, d'achat de joueurs, etc. Le film fait même passer un petit frisson à ceux qui ne sont pas du tout adeptes de sport (moi le premier), en nous faisant comprendre qu'en 2002, Billy Beane a plus ou moins révolutionné la façon de penser des recruteurs de base-ball. Alors que son club bénéficiait d'un financement ridiculement bas par rapport aux autres équipes en compétition, Billy Beane a, à l'aide de son acolyte Peter Brand (Jonah Hill), introduit une toute nouvelle façon de sélectionner et de constituer une équipe de joueurs, en basant sa stratégie sur des statistiques. Avec quelques calculs sur les performances des joueurs, il a pu recruter de bons éléments qui n'avaient jamais été exploités à leur valeur, et donc à bas prix. Bref, avec un budget assez faible, il a réussi à former une équipe digne de ce nom (lâché pourtant par la plupart de ses collaborateurs au début) capable de rivaliser avec les plus grosses. Une véritable révolution dans le monde du baseball (en tout cas le film nous présente ça comme ça). On peut éventuellement reprocher au film d'être un peu trop fade à certains moments, notamment dans ses personnages. Certains personnages sont un peu stéréotypés (notamment Peter Brand, vu un peu comme un geek incompris, la tête à fond dans les calculs), mais dans l'ensemble le casting est correct (Brad Pitt en tête bien évidemment). Le point fort de ce film est de nous présenter les joueurs de baseball comme de la marchandise, qu'on achète, revend, échange, et les recruteurs comme des hommes sans "coeur" si j'ose dire. Car pendant tout le film, j'ai eu en quelques sortes de légers ascenseurs émotifs concernant ce sujet. Autant on se sent sympathique envers Billy Beane lorsqu'il recrute des joueurs voués à tomber dans l'oubli, comme Bradford ou Hatteberg (leur surprise fait plaisir à voir parce qu'on sent qu'ils se considèrent un peu comme des losers), autant j'ai trouvé que les méthodes employées étaient parfois impitoyables. Billy Beane ne se gêne pas pour virer ses joueurs sans retenue et on ressent quand même de la peine pour ces pauvres joueurs qui perdent tout d'un coup et voient leur avenir s'effondrer, ce dont tout le monde se fout au sein du club. Le pire est certainement pour le gars qui se fait virer et qui demande "tu m'as vendu ?", ce à quoi Billy répond "non". Dur pour le moral, j'imagine. A part ça, j'ai beaucoup aimé les situations humoristiques qui donnent du réalisme à certaines scènes, avec des trucs tout cons qu'on voit rarement dans les films (par exemple "je crois qu'il y a une erreur de calcul" - "non attend, t'as oublié la retenue là'). Ca coûte rien, ça prend 10 secondes, ça fait marrer et ça donne au film un côté "vie quotidienne" que les réalisateurs prennent rarement le temps de créer. Sinon, la BO est vraiment sublime, avec des morceaux de musique magnifiques ou au contraire très tendus lors des confrontations importantes (la séquence lors de laquelle Oakland enchaîne les victoires est un pur délire). On ressent un bref instant ce que les fous de sport doivent ressentir dans les stades, là le film marque un gros point. Pour finir, j'ai bien aimé l'histoire parallèle entre Billy Beane et sa fille. Elle est à peine abordée (tant mieux), ce qui permet de ne pas trop nous ennuyer (quand le film commençait à ne plus parler du baseball et à partir sur autre chose, j'étais déçu). Mention également à la scène finale, magnifique avec un Brad Pitt des plus touchants (il est fort le salaud), qui nous laisse au générique final avec une petite pointe d'émotion pour ce parcours et cet homme passionné de sport. Une vraie réussite