2011 est une année pleine de surprise. Drive, The Artist, Tintin ou encore Intouchables, qui bat des records en ce moment en salle (espérons que le film dépasse l’infamie qui trône en tête du box-office français)… Le mois d’Octobre nous a offert de grands moments de cinéma. Forcément, après un tel cru, difficile pour les sorties de Novembre de rivaliser. Et pourtant, il y a toujours des irréductibles, capables de prendre d’assaut le top 10 des films découverts cette année en salle. "Le Stratège" fait parti de ces films. Une perle, assurément.
Il y a une douce ironie dans le titre. Le film aurait pu s’appeler "Chronique d’un loser", ou "Perdre pour les nuls". Le nul en question, c’est Brad. Ex-futur grand espoir du baseball professionnel, recruté à la sortie du lycée, et qui n’a jamais concrétisé les espoirs que les recruteurs avaient placés en lui. Devenu lui-même recruteur, à la tête du équipe en décomposition, il décide de faire confiance à Pete/Jonah Hill et son approche mathématique pour créer une équipe de champions
Basé sur l’histoire vraie de Billy Beane, le film nous dévoile les ficelles d’un sport méconnu sur le vieux continent : le baseball. C’est à peine si les gens en connaissent les règles de base. Difficile donc d’imaginer l’impact d’un tel scénario sur nos esprits néophytes. C’était sans voir la signature d’un certain Aaron Sorkin à la fin du manuscrit. Déjà à l’origine de l’adaptation de "Social Network", l’auteur manie la plume avec une telle dextérité qu’il saurait transformer le récit de la vie de Cindy Sanders en chef-d’œuvre du 7ème art.
Des dialogues taillés à la serpe, lancés à tout-va, une narration sans faille, des personnages bien écrits, ayant tous un certain degré d’importance. Sorkin ne fait pas dans la fioriture, il va à l’essentiel. Et l’essentiel ici, c’est Billy Beane lui-même. Protagoniste empathique, goinfre, bourré de principes, papa poule, et loser invétéré. Pour incarner le bonhomme, un Brad Pitt au style discutable, mais qui livre une interprétation impeccable. Trop rare à l’écran, et aux portes d’une retraite anticipée, il démontre encore qu’il fait parti des grands d’Hollywood.
À ses côtés, Jonah Hill ne se débine pas, sans trop en faire. Le duo paraissait improbable sur papier, pourtant la complicité discrète qui s’immisce dans la relation entre lui et le beau Brad s’avère très touchante. Si un soin particulier est apporté au récit, derrière la caméra, Bennett Miller (papa de la campagne "George Who?" de Nespresso) n’en oublie pas la forme. Une bande originale très discrète accompagne une mise en scène singulière et esthétique.
"Comment ne pas s’éprendre du baseball ?" répète Brad Pitt affublé de son jogging ridicule. On se le demande, en effet. Des dialogues culotés, une narration sans faille, des personnages attachants, filmés avec beaucoup de soin. Le sujet risqué, mais bien traité, s’avère une stratégie payante. HOMERUN !