Réalisé en 1955, "Il Bidone" fait partie de la 1ère période, plus ou moins néoréaliste, du cinéma de Fellini. Période qui n’est pas la plus riche du Maestro, mais qui compte quelques films intéressants, dont "Il Bidone" n’est pas des moindres. Le film nous narre l’histoire de 3 détestables arnaqueurs, passant leur temps à "bidonner" de pauvres gens. Leurs diverses arnaques, assez machiavéliques, ont d’abord l’allure de sketchs, suscitant plutôt un effet comique. Mais le contexte social des arnaqués finit progressivement par changer le ton du film. Les arnaques deviennent odieuses, les situations tragiques, et la conscience des 3 loustics commence à être sérieusement mise à l’épreuve. Le film s’éloigne alors du réalisme attendu et prend l’allure d’un conte sur la face sombre de la nature humaine. Les 2 personnages encadrant Augusto, le vieux "boss" de la bande, se déréalisent petit à petit, se révélant n’être que le reflet des 2 facettes de la personnalité du chef: la crapule sans âme et le repenti en quête de rédemption. Augusto oscillera dès lors entre ces 2 pôles, poursuivant ses arnaques mais se rapprochant parallèlement de sa fille délaissée depuis de trop nombreuses années. Il ne parviendra cependant pas à trouver le chemin de la rédemption, et, après une séquence fabuleuse qui évite la facilité d’un dénouement attendu et donne de la profondeur au film, finira misérablement sur le bord de la route. Nous trouvons déjà dans "Il Bidone" certaines scènes qui annoncent le style à venir de Fellini. Ainsi de cette séquence d’errance nocturne, pourvue d’une certaine irréalité fantastique, qui annonce ces sublimes scènes d’aurore, où la griserie enfin dissipée laisse place à la solitude, à l’angoisse et à la peur. De même, la séquence du réveillon rappelle inévitablement les soirées mondaines de "La dolce vita". "Il Bidone" fait partie d’un cinéma que l’on qualifiera de "classique" dans sa forme, mais qui contient déjà en son sein les éléments de sa propre révolution.