Composé exclusivement de 23 monologues, le film parvient à dépasser le caractère expérimental et provocateur du concept de départ. Cette expérience n'est pas due à une virtuosité particulière mais à une approche radicale, sincère, frontale, minimaliste et très maîtrisée de ce qu'on pourrait appeler les éléments de base du cinéma parlant. Chacun de ces monologues est incarné par un acteur qui semble livrer son âme en délivrant un souvenir très intime et personnel, une part cachée de lui-même. Quand le film débute, le spectateur peut d'ailleurs se demander s'il s'agit de documentaire ou de fiction
Dans la plupart des films intimistes français, les cinéastes s'autorisent rarement de conserver au montage plus d'une séquence reposant exclusivement sur un monologue. La raison en est certainement dans le fait que celui-ci est réputé pour être statique et par essence avant tout littéraire ou théâtral, donc suspecté de ne pas appartenir au langage du cinéma. Le monologue est aussi un moment périlleux où le cinéaste se met de fait en péril parce que toute l'attention du spectateur est concentrée sur la justesse du texte et de l'acteur qui doit donner l'impression de se mettre à nu pour convaincre.