C'est un retour aux sources, à double titre : retour sur la naissance d'une nation, retour aux origines du cinéma. Sur le plan formel, Raya Martin s'inspire des films muets, époque coloniale : noir et blanc d'un autre âge, rythme saccadé (16-18 images par seconde, au lieu de 24), toile peinte en fond de décor, costumes et accessoires désuets (fausse moustache, faux fusil...), insertion d'une parodie d'actualités, incrustation floutée d'images dans l'image. Sur le plan dramatique, on devine que les personnages ont une dimension symbolique. On entrevoit un arrière-plan historique, mythologique, mystique... Mais il s'avère hermétique pour qui ne connaît pas les Philippines. Sans accéder vraiment à la portée métaphorique du film, il devient très difficile de se passionner pour cette histoire qui, au premier degré, n'est que le récit d'une vie sauvage, répétitive. Bref, on s'ennuie ferme. Par ailleurs, on perçoit l'importance que le cinéaste a voulu accorder à la nature, aux éléments. Mais le dispositif formel mis en place (tournage en studio, aspect bricolé et naïf) en limite complètement l'expression.
Petit rapprochement pour finir : il y a une inspiration commune entre le cinéma de Raya Martin et celui du Thaïlandais Apichatpong Weerasethakul (Oncle Boonmee) : spiritualité diffuse, nature et surnature, esthétique contemplative...