L’histoire d’une rencontre, d’un regard qui précédera une liaison amoureuse pendant cinq ans, celle du grand pianiste Liberace : Homme excentrique, interprété par l’incroyable Michael Douglas, ayant un goût prononcé pour le luxe, et celle d’un modeste jeune homme : Scott Thorson, n’ayant pour dessein premier que de devenir vétérinaire, rôle endossé par Matt Damon.Première apparition, première réaction « Woaw ! He’s incredible ! », cette fascination engendre une liaison que l’on sait prédestinée à l’échec. Comme nous le fait anticiper Billy et sa mine lassée par cette vie, Scott va prendre le relai. C’est pour cela que nous avons du mal à nous attacher à leur amour, mais qu’on en cherche tout de suite les premières rides. Cette excentricité, ce narcissisme, cette dimension presque incestueuse, la dominance des couleurs dorées scintillantes sont volontairement accentuées dans le film. Cependant, les questions sur l’amour, la sexualité ou encore la souffrance ressentie et la déchéance dans la drogue sont peu convaincantes, et les stéréotypes sur l’homosexualité ne sont pas si enterrés qu’ils auraient pu l’être. L’auteur nous annonce un film fort et tragique, cousin de celui d’Ang Lee, mais nous sert finalement La cage aux folles sur un plateau doré. La mise en scène volontairement kitch mais un peu trop hollywoodienne de Soderbergh enlève l’empathie que l’on pourrait ressentir envers les personnages. Le titre en anglais est sûrement plus représentatif du film, « Behind the Candelabra », puisqu’est en effet décrit ici la façon dont ce voleur de jeunesse, enfermant ses poupées dans une cage dorée, les refaçonne comme le jeune homme qu’il fut. C’est une variante des caprices de Dorian Gray avec Scott qui devient son tableau se vieillissant, tombant dans la débauche, et ce jusqu'à ce qu'il déchire lui-même le tableau pour se libérer de cette emprise qu’a pris Liberace sur lui
, Lee que nous retrouverons peu de temps après sur son lit de mort, complètement transformé, et suivant le même destin que Dorian Grey.
Le travail le plus remarquable est sûrement celui de la reconstitution. Les décors, les costumes et le mobilier personnel de Liberace sont tous incroyablement fidèles à ceux de l’époque. Tout autant que la première scène où le pianiste prouve sa performance avec le fameux Boogie Woogie, performance reproduite à l’identique de l’originale. Pour apprécier le film à sa juste valeur, il est capital de connaître le personnage. C’est un Liberace qui se réincarne et perdure à travers le temps qui nous est livré.