Soderbergh, l'éternel moyen, l'apôtre du bof, s'attaque dans le dernier film de sa carrière -le der des ders : les paris sont ouverts-, à la vie du roi du kitsch : Walter Liberace.
Hein, qui ?
Liberace. Un pianiste virtuose dont le nuage de paillettes qui s'en libérait n'a -heureusement- jamais dépassé les frontières nord-américaines ; un virtuose insipide, soit à la technique exceptionnelle mais à l'inspiration limitée ; un séducteur de grand-mères et de jeunes garçons très refait ; bref, un André Rieu à la fortune et à la mégalomanie céline-dionnesque, ici brillamment interprété par Michael Douglas. De ce héros du petit écran, du King of Queers, de la Queen of Bling, le réalisateur explore donc les facettes pas toutes aussi scintillantes que celles d'une boule disco. Il se concentre sur sa liaison complexe et complète avec Scott Thorson, toyboy, amant, fils, parfois gênante mais jamais licencieuse, dont il se sert pour aborder le star system et dont il y avait bien plus à tirer. Car pour pallier la linéarité de la narration, du montage, ainsi que la prévisibilité qui en découle, Soderbergh aurait pu exacerber le sentiment de dépendance et d'abandon qu'éprouve le personnage joué par Matt Damon avec talent, déjà orphelin et qui, malgré les mises en garde, se croît singulier -à raison- et irremplaçable -à tort ; il aurait encore pu rendre davantage brutale la confrontation des deux hommes au monde extérieur, réel, notamment à la justice et à la maladie. En somme, la destruction de leur relation n'est pas à la hauteur de son élaboration, le rejet de Scott, pourtant bien amené, ne bénéficie pas du même traitement que la prise de possession dont il fait littéralement l'objet : comme dans Effets secondaires et malgré une scène finale touchante, le réalisateur bâcle le dernier tiers de son film. Mais les deux premiers valent le déplacement : la place de cinéma revient toujours moins cher que l'entrée de Madame Tussauds ou du musée Grévin, et le spectacle s'avère bien plus amusant -mention spéciale à Rob Lowe, hilarant en chirurgien plastique plastifié.
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