Ce n'est pas sans empressement que l'on attendait le nouveau film d'Hirokazu Kore-Eda ; "Nobody knows" nous avait fait comprendre comment le cineaste japonais, par l'epure et la luminosite, parlait des fantomes, de l'absence. Ici, malgre les nombreuses figures qu'impose la famille japonaise, c'est cette absence qui, pardessus dialogues, gestes et regards, decompose et recompose cette famille comme les autres. Et le cinema de Kore-Eda tend en premier lieu a demontrer a quel point le quotidien et le banal sont extraordinaires. C'est toute la force de son cinema ; faire apparaitre, comme personne d'autre ne sait le faire, des presences, des ames qui animent avec intensite le moindre mouvement de chaque etre vivant. L'absence ici n'est pas un ressort melodramatique - auquel cas il fut facile de reprocher au cineaste une intervention larmoyante - , mais une presence paradoxale, une emotion interiorisee. Il n'y a pas de tragique, de dramatique ici, ni de non-dits : le deuil est devenu une pensee certes terrible mais auquel tout le ;onde s'est habitue (y compris la capricieuse grand-mere). C'est la legerete qui domine, le soleil, la douceur du printemps, de simples petits eclats comiques qui cachent gravite et souffrance. "Still Walking" est si leger (au sens apaisant du terme), d'une telle simplicite formelle, et par-la meme si beau, qu'il procure par l'effet inverse du cinema des emotions phenomenales et terrassantes, sans meme que le cineaste n'ait eu besoin d'appuyer quelques scenes, dialogues ou musiques. Le travail sur l'espace (visuel et sonore) rapproche le montage d'une idee naturelle et vecue, d'ou ressort cette agreable limpidite ; l'alternance entre les dialogues familiaux dans un perimetre restreint et la naissance des bourgeons, puis l'elargissement du cadre et des sons exterieurs sur une plage aux lumieres eteintes. Les lieux se repetent, deviennent une habitude pour le spectateur, embarque dans une douce ballade printaniere, et d'ou nait une familiarite emo