Le début du film rappelle immanquablement "Buffet froid": un personnage en interpelle un autre dans un lieu désert et glacial, et le dialogue qui s'amorce n'en est que plus cinglant, surréaliste. Ensuite, on a droit au plus mauvais Blier, provocateur complaisant, grossier et parfois grotesque. Blier nous fait le coup de la prostituée au grand coeur, celle qui vend ou donne du plaisir par plaisir, par vocation. Il faudra attendre le seconde partie du film pour que le sens-même du sujet se précise. Jusqu'alors ce ne sont que des scènes de cul sans intérêt, complaisantes,
où la dénommée Marie démontre sa bonté et sa générosité sexuelle à ses clients et à "son homme", un clochard aux allures christiques qu'elle vient de rencontrer. Mais trahie par celui-ci, Marie s'étiole, ressent un besoin d'amour et de sécurité; elle raccroche pour une vie conjugale et maternelle qui s'annonce terne.
Le film semble être un condensé de l'existence de la femme (prostitution comprise?), une parabole sur la féminité. La femme est présentée comme un animal sensuel doué pour le plaisir, pour l'amour. Sa générosité naturelle, la profondeur de ses sentiments et de ses désirs ne rencontrent, hélas, que l'incompréhension et l'égoisme de l' homme, lequel,
au terme du film, sous les traits de l'ex-amant, finira par demander pardon
. Blier se montre à ce moment du film plus inspiré, plus sincère. Débordant d'amour et de frustration, ses personnages féminins sont plus convaincants. Le sens de l'aphorisme et du paradoxe de Blier, jusqu'alors graveleux, y gagne en signification et Anouk Grinberg, dans un rôle impudique particulèrement difficile, parvient à dépasser la caricature douteuse dont elle est l'interprète. Pas sûr, néanmoins, que ce retour de Blier à de meilleurs sentiments satisfasse les féministes.