Acteur déjà confirmé et reconnu (un Oscar du meilleur acteur dans un rôle principal en 2006 pour « Truman Capote » de Bennett Miller), Philip Seymour âgé de 42 ans en 2010 met en scène son premier film avec « Rendez-vous l’été prochain ». Il ne lui reste plus que neuf films à tourner et moins de cinq ans à vivre, finalement vaincu par sa longue addiction aux drogues et à l’alcool. Il n’est sans doute pas au mieux quand il décide de porter à l’écran une pièce de Robert Glaudini, « Jack Goes Boating » qu’il avait lui-même interprété à New York aux côtés de John Ortiz et Daphne Rubin-Vega eux aussi présents dans le film. Très investi Hoffman produit le film avec John Ortiz. Le résultat est plutôt satisfaisant, Philip Seymour Hoffman faisant montre d’une réalisation fluide et épurée expose tels qu’on peut les voir dans la vraie vie quatre personnages de la petite classe moyenne new-yorkaise qui chacun cherche à trouver l’amour ou à maintenir son couple en vie malgré les rancœurs accumulées au fil des années. On sait que le cinéma américain excelle dans le genre si périlleux des comédies dramatiques douces-amères qui font mouche sans effet de manche là où cinéma français depuis la disparition des Claude Sautet, Claude Miller et le retrait des Pascal Thomas, Pierre Jolivet ou André Téchiné s’est mis en tête un peu par idéologie que la tartine devait être grassement beurrée pour donner envie de « vivre ensemble ». Philip Seymour Hoffman ne fait pas exception à la règle qui trouve immédiatement le ton juste tant dans sa réalisation que dans son propre jeu. Aucun jugement de valeur, juste quatre adultes dans la quarantaine se demandant s’ils vont parvenir à aborder les années de l’âge mûr en ayant trouvé un accord avec eux-mêmes. Le pari semble difficile à relever pour Jack (Philip Seymour Hoffman) particulièrement introverti et mal à l’aise avec un physique qu’il ne juge pas séduisant ou pour Connie (Amy Ryan) qui semble être passée à côté d’elle-même sans doute trop rigide et exigeante.
Les deux chacun ami de son côté avec Clyde (John Ortiz) et Lucy (Daphne Rubin-Vega) vont être mis en contact par le couple qui de prime abord paraît avoir surmonté le cap des ans qui passent.
Dans la première partie, Hoffman montre avec finesse comment avec un peu de volonté tous les complexes peuvent être surmontés et comment l’amour naissant peut se révéler être un moteur pour gravir des montagnes que l’on croyait infranchissables (apprendre à nager ou à cuisiner !) et qui n’étaient en vérité que des collines. Mais les choses ne sont jamais totalement ce qu’elles paraissent être et le couple qui les entraîne vers l’union va commencer à révéler ses propres failles. En somme les choses de l’amour qui sont si complexes montrent que rien n’est jamais perdu ou acquis dans ce domaine si merveilleux qui recèle aussi sa part d’ombre. Les acteurs qui se connaissent bien sont parfaitement en phase impliquant parfaitement le spectateur dans les petits tourments et blessures intimes de leurs personnages. La musique composée par Evan Lune et Grizzly Bear illustre parfaitement chacune des humeurs et notamment celle du générique qui au son de « Peace Piece » de Bill Evans nous rappelle que nous avons vécu un joli moment offert en cadeau par ce magnifique acteur sans doute assez proche par certains aspects des deux personnages masculins du film et qui, parti bien trop tôt aura tout de même eu le temps de laisser son empreinte indélébile sur le cinéma américain des années 2000.