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PhilippeToile
45 abonnés
740 critiques
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2,5
Publiée le 10 septembre 2008
Cet opus de jeunesse de Wong Kar-Wai, qui nous revient avec un nouveau montage, reste toujours aussi difficile d’accès. Il est vain de vouloir suivre la trame scénaristique de cette parabole sur les meurtrissures de la solitude. Cette suite de tableaux esthétisants et statiques ne livre ses beautés qu’au prix d’un effort pour aller vers sa poésie automnale. Wong Kar-Wai ponctue sa réflexion intériorisée par quelques scènes de combat très chorégraphiées et abusant du ralenti, annonçant le dernier style des films de sabre d’un Ang Lee ou d’un Zhang Yimou. A recommander aux cinéphiles curieux de la trajectoire très personnelle du réalisateur de “In the Mood for Love” et “My Blueberry Nights”.
Visuellement très impressionnant: quel jouissance que de s'abandonner dans les formes, les couleurs, le rythme de ce petit bijou hong-kongais (+ Christopher Doyle). La beauté des plans et le montage du film sont tellement hypnotisants qu'on en oublie presque qu'on ne saisit pas complétement le récit. On sort de la salle fasciné, étourdi par tant de grâce.
Le montage est brillant, comme dans tous les films de Wong Kar Wai : flash-backs multiples, ralentis sublimes, images grandioses. WKW est tant un poète de l'écran qu'un technicien accompli, et on se doit de souligner le travail remarquable de ses collaborateurs attitrés, dont Christopher Doyle à la photo et Frankie Chan pour la partition musicale.
Pour autant, ce projet épique, que l'on aurait mieux vu entre les mains de Zhang Yimou ou Chen Kaige, ne séduit pas totalement même s'il s'inscrit dans la cohérence thématique et stylistique de l'auteur. Est-ce dû à la profusion des personnages, au récit déstructuré à l'excès, aux conventions d'un genre réservé aux intitiés ou au souvenir rétrospectif de bijoux mieux ciselés dans la filmographie du maître ?
C’est ce qui fait la force de Wong Kar-Wai, sa faculté de s’approprier n’importe quel genre cinématographique pour en faire des merveilles d’éblouissement. Dans LES CENDRES DU TEMPS – REDUX, le sable du désert est une étendue de paillettes d’or ; le ciel qui le surplombe, un abysse de bleu vertigineux ; chaque éclaboussure d’eau est une pluie de cristaux ; tout déversement de sang s’apparente à une longue et élégante étoffe de pourpre ; chaque mouvement de caméra est un périple vers cet univers où règne la démesure d’une violence baroque et magnifique, d’une rage de vaincre insatiable et d’une passion dangereuse. Réflexion sur le temps, l’espace et les sentiments ; conte de quatre saisons sensoriel, contemplatif de par sa sublimation (numérique) solaire et granuleuse, LES CENDRES DU TEMPS – REDUX réunit tout ce qui fait la puissance et la séduction formelle de l’éclatant cinéma du réalisateur, dans lequel chaque plan se doit d’être un tableau. C’est aussi ce qui fait oublier l’opacité du scénario, tout en sachant justement que dans un film de Wong Kar-Wai, ce sont ces zones d’ombre, cette grande part de mystère, qui envoûtent et fascinent, font de l’œuvre un chef d’œuvre.