Remarquable. The Cinderella Man, Fighter, Ali, Million Dollar Baby... il est épatant de voir à quel point l'univers de la boxe, particulièrement quand celle-ci n'est pas une fin en soi, a été un terreau fertile pour les films de qualité. Warrior s'inscrit dans cette droite lignée. Il ne faut pas sous-estimer l'importance qu'à une oeuvre à vous emporter et ce même si on distingue un scénario très précisément calculé pour arriver à cet effet. Plus encore parce que le thème de la boxe est battu et rabattu les ficelles apparaissent énormes (le gosse malade du coeur, le père alcoolique, les deux frères ennemis, la belle blonde...), le ton un peu trop patriotique (la camaraderie des marines, la dramaturgie axée sur la rédemption, les commentateurs du matchs, l'opposition US-Russie...) et surtout le scénario sans audace (où sont les rebondissements ?) mais bizarrement j'ai marché. J'ai même été complètement happé. Je me suis enfoncé dans Warrior comme on plonge en apnée entre oppression, violence et jouissance. Au fil des années et des visionnages, l'accroissement de ma culture cinématographique s'accompagne d'une tendance de plus en plus marquée devant mon écran à rester spectateur d'un film, privilégiant sans le vouloir l'analytique au ressenti, l'observation à l'émotion. A croire que le cerveau développe une protection, une lassitude peut-être aussi, lentement construite par le spectacle de films trop quelconques agités par des sentiments émoussés, des ressorts éculés, lignes pré-machées et acteurs fades ou mono-rôle. On ne peux donc que remercier Gavin O'Connor et consorts de nous rapeller ce à quoi devrait ressembler le cinéma: un quelque chose qui vous choppe, vous embarque et vous fait vivre par la grâce d'une histoire et d'une caméra. Warrior tire aussi sa force d'un casting dont la justesse n'a d'égal que la constance. Tom Hardy en particulier arrive à donner à son rôle de bête blessée une profondeur bouleversante. La réalisation est excellente et appliquée, accordant autant d'attention à des combats très réalistes qu'aux moments les plus intimes. Un petit bémol sur la fin, forcément attendue mais inutilement ampoulée et abrégée. J'ai vécu Warrior intensément, avec le sentiment de regarder un film de qualité. Et c'est cette expérience poignante qui, malgré les bémols exprimés ci-dessus, justifie mon excellente note.