L’homme animal, Tom Hardy, face à l’homme de courage et de persévérance, Joel Edgerton. Gavin O’Connor parvient à faire du face à face entre deux frères brisés par la dure réalité de la vie un film à la fois hautement dramatique mais aussi un film revenant curieusement sur les fondements du film de fight des années 80 et 90. Jean-Claude Van Damme et consorts ont donc laissés une empreinte singulière sur l’univers cinématographique du cinéaste d’origine irlandaise à tel point que celui-ci réutilise le concept du tournoi entre grands bagarreurs pour nous faire vivre l’odyssée de deux frangins complètement opposés. Dès les premiers instants, la retrouvaille en père et fils illustre la noirceur de la situation, le combat n’étant en somme que l’atout attractif du film qui s’avère être un savant mélange entre dramaturgie convaincante et film de combat impressionnant, comme pouvait l’être le sublime Fighter de David O’Russell.
Agréablement composé d’un casting impressionnant dans son interprétation, Warrior est aussi bien déchirant qu’amusant. Lorsque sur le ring, les personnages se rouent de coups, le niveau de fun est assuré, tout comme peut l’être l’émotion lorsque père et fils se déchirent verbalement. Il faillait pour ça des qualités indispensables, celles de Tom Hardy, armoire à glace sans pitié au tempérament animal, celle de Joel Edgerton, humble, attachant et impressionnant dans l’effort physique, mais aussi celle de Nick Nolte, acteur vieillissant composant ici l’un de ses rôles les plus éprouvants d’un point de vue émotionnelle. Tous les trois souffrent d’un passé douloureux et tous les trois se retrouvent lors d’un tournoi majeur de MMA, arts martiaux multiples, un tournoi presque enfantin dans sa démarche face au sérieux affiché par le propos du film.
Soyons franc, si l’on prend son pied à contempler les victoires dans la douleur du personnage d’Egereton, si l’on jubile devant la sauvagerie de Tom Hardy, tout ceci ne semble qu’anodin face à la force des dialogues, notamment lors des échanges entre Tommy et son père. Si les scènes de combat sont saisissantes quoique parfois très académiques, les échanges verbaux sont ici nettement plus imposants que les échanges de coups. Que ce soit dans le sillage de Tommy, indéchiffrable cogneur rendant à la vie dure à son père tout en ayant besoin de lui ou dans celui de Brendan, père de famille à qui l’argent manque cruellement, la destinée des deux frangins se jouent d’abord mentalement puis, secondairement sur le ring. L’on connaît sans trop pousser les deux candidats en finale, reste à savoir qui sortira vainqueur, mentalement d’avantage que physiquement.
La réconciliation est-elle possible? Il est dès lors très paradoxal que Gavin O’Connor parvienne à offrir un tel final, émouvant, sans offrir réellement d’explications sur sa manière de voir l’union des deux fils d’une mère disparue et d’un part cogneur et alcoolique. La principale qualité du film, foncièrement bon, est bien entendu son casting, sans quoi les émotions auraient nettement plus de mal à passer. Le suspens du combat final est double. Qui gagnera? Comment les deux frères vont-ils interagir sur le ring? Excellent fin de combat, tirant sa réussite aussi bien auprès du film d’action bêta que du drame humain habilement écrit. Malgré des émotions faciles, le travail de Gavin O’Connor est très prometteur. La palme revient tout de même à Tom Hardy qui endosse là un rôle de tueur du ring qui lui aura sans doute permis de captiver Nolan pour que celui-ci lui offre son rôle de Bane pour clôturer sa fameuse trilogie. 16/20