C'est l'histoire de trois "gamines", deux brunes et une blonde, élevées par leur mère d'origine italienne et dont l'enfance a été plombée par l'absence du père ; surtout celle de Sybille, la blonde (incarnée avec un grand naturel par Zoé Duthion), dont tout le monde s'accorde à dire qu'elle est le portrait craché de son géniteur, artiste comme lui. La petite fille va entraîner ses soeurs sur la piste de cet homme qui les attire et leur fait peur à la fois car lorsqu'il frappe à leur porte, leur mère appelle à la rescousse l'oncle Salvatore, "Italiano vero" (la chanson de Toto Cutugno ponctue le film de son rythme entraînant) qui sait défendre les siens et faire respecter les traditions. Ce n'est que parvenue à l'âge adulte (Sylvie Testud prend alors le relais du personnage) qu'elle va enfin le rencontrer et comprendre sa mère : follement amoureuse de son mari, elle l'a pourtant exclu de la famille car il était incapable de l'assumer, peintre raté tombé dans l'alcool. Dans ce film féminin (Eléonore Faucher) adapté du roman de Sylvie Testud et mettant en scène le destin de quatre femmes, la figure centrale est pourtant celle d'un homme, absent pour les unes, clandestin pour l'autre, fantasmé et désiré par toutes. C'est une plongée sensible et délicate dans le monde de l'enfance, sa logique bien à elle, son désir de vérité, son besoin de tendresse, son intransigeance. Sybille est effrontée, indisciplinée et bagarreuse. Elle va réussir sa vie de femme et de comédienne, mais elle se construit autour d'un manque : "Je n'ai pas de père, je n'ai qu'une photo", dit-elle. Sa famille maternelle italienne, plutôt envahissante, traditionnelle, prompte à juger et à blesser, ne peut combler le vide du côté paternel. L'importance des origines, de la filiation, d'avoir sa place exacte dans une communauté humaine, domine ce récit. Mais la gravité du propos n'altère pas l'impression de luminosité et de gaieté qui colore ce film : l'Italie y est sans doute pour quelque chose!