2014, année durant laquelle des sujets cinématographiques se font une guerre sans merci, pour savoir laquelle des versions proposées sera la plus rentable et la plus appréciée du public. S’il a longtemps était question du grand couturier Yves Saint Laurent (avec les films de Jalil Lespert et de Bertrand Bonello), 2014 se présente également comme l’année d’Hercule, qui est sorti sur nos écrans par le biais de deux visions hollywoodiennes : une de Renny Harlin (La Légende d’Hercule), l’autre de Brett Ratner avec l’incontournable Dwayne Johnson dans le rôle titre. C’est d’ailleurs de cette version que nous allons parler ici. Une adaptation non pas des mythes grecs mais plutôt du roman graphique de Steve Moore et d’Admira Wijaya (publié en 2008), qui offrait une toute autre relecture du personnage. Un succès que le film ne saura, malheureusement, pas renouveler.
Pour ceux qui ne connaissent pas l’œuvre d’origine, il vaut mieux vous prévenir d’emblée : ne vous attendez pas à des créatures ou autres personnages surnaturels issus de la mythologie grecque, il n’y en a tout simplement pas ! Hercule version Steve Moore, c’est une sorte de mercenaire qui, avec ses compagnons de routes, se font payer pour combattre des légendes locales. Si vous voulez un exemple similaire, notre héros est comme Sherlock Holmes affrontant le chien des Baskerville. Une sorte de Frères Grimm (le film de Terry Gilliam) où les fameux travaux soient disant accomplis par Hercule ne sont que des « missions » enjolivées par un conteur dans le but de bâtir sa légende. Où les monstres et les dieux ne sont que les fruits de la culture et de la religion. Où Hercule n’est qu’un simple humain et non un demi-dieu comme il nous a toujours été présenté. Bref, le roman graphique nous livrait un Hercule comme nous ne l’avions jamais vu auparavant, au risque d’en décevoir certains adeptes. Il est donc normal que ce film ne soit pas au goût de tout le monde, surtout avec une bande-annonce mensongère qui insistait bien sur la présence de l’Hydre de Lerne, du Sanglier d’Érymanthe et du Lion de Némée. Ne soyez donc pas déçus, vous savez maintenant à quoi vous en tenir !
Mais malgré le fait d’adapter une œuvre qui joue habilement avec la construction enjolivée d’un mythe, cela ne donne pas forcément un film qui soit à la hauteur de son modèle. Surtout quand Hollywood fait du Hollywood, à savoir vendre quelque chose, se servir d’un détail (rien que le personnage en lui-même attire les curieux, surtout quand nous avons une grande star actuelle en tête d’affiche) pour appâter les spectateurs et donc gagner de l’argent. Hercule version 2014 est, sans conteste, un de ces longs-métrages que l’on qualifierait sans difficulté de pur produit hollywoodien. Il n’y a qu’à voir le réalisateur à la tête du projet : Brett Ratner. Un cinéaste réputé pour livrer des films qui ne font que suivre bêtement le scénario, à la mise en scène quasi inexistante et ne comptant que sur son casting (la trilogie Rush Hour, Dragon Rouge, X-Men : l’Affrontement Final, Le Casse de Central Park). Hercule est de cet acabit : une aventure menée par des personnages principaux clichés au possible, pour une trame scénaristique quasi vide et déjà vue mille fois, prévisible. De plus, l’adaptation subit les codes hollywoodiens qui sont d’attirer tous les spectateurs potentiels, même les plus jeunes. C’est-à-dire faire l’impasse sur tout le côté violent et cru du roman graphique pour en faire un film amusant et (presque) tout public. De quoi hérisser le poil de bien des fans !
Un film de producteurs fade, voici comme se présente Hercule version 2014. Un potentiel visuel et scénaristique énorme transformé en une simple série B du même niveau qu’un épisode de Xena, la Guerrière, les moyens des studios en plus (soit 100 M$). Mais il faut bien se l’avouer, le film de Brett Ratner possède quelques atouts qui permettent de passer un agréable moment, sans se prendre la tête. Si le long-métrage, en plus de mettre de côté l’ambiance propre à l’œuvre originelle, oublie le style visuel d’Admira Wijaya, il propose toutefois suffisamment de morceaux de bravoure rondement menés pour intéresser le spectateur pendant 98 minutes. En mettant sur le devant de la scène des comédiens fort sympathiques (Dwayne Johnson s’en sort honorablement même s’il n’est pas inoubliable) qui arrivent à rendre leur personnage respectif attachant (en tout cas en ce qui concerne notre troupe de héros). De plus, les effets visuels ne sont pas mauvais dans l’ensemble, les séquences d’actions (dont deux scènes de batailles) se montrent plutôt efficaces, un humour et une lecture au premier degré font de temps en temps mouche… À défaut d’être un blockbuster qui marquera les esprits, Hercule n’est finalement qu’un petit divertissement sans prétention qui saura passer le temps.
C’est sûr, le film de Brett Ratner risque de se faire de nombreux rétracteurs : ceux qui pensaient avoir une version spectaculaire des douze travaux d’Hercule, et ceux qui attendaient une adaptation léchée d’un roman graphique de renommée. Tous devront malheureusement se contenter d’un énième blockbuster qui surfe sur la mode du péplum tout en gardant un statut de série B gâchant une éventuelle envergure. Comme le récent Le Choc des Titans (et donc de sa suite). Sympa à regarder, mais pas mémorable pour un sou.