Un excellent film des frères Larrieu, tout d’abord par le choix de ce sujet très ambitieux. Peu de film se sont intéressés d’aussi près à ce thème : Que ferions- nous si la fin du monde était annoncée ? Quelles réactions aurions- nous ? Comment se dérouleraient ces derniers jours ?. Et sur un sujet si vaste les frères Larrieu arrivent déjà à nous bluffer par une mise en scène très créative et une description très audacieuse. Avec un budget probablement modeste (on a pas les moyens d’un blockbuster US) , ils arrivent à nous faire ressentir ce que serait cette dégradation, sans effets spéciaux, par des touches astucieuses, illustrations de la catastrophe ( guerre mondiale ?!) , dans chaque lieu où passera le héros, car il s’agit d’une sorte de Road Movie , de fuite en avant, pour échapper au pire, des signes seront là : de l’eau vert fluo qui s’échappe d’un robinet à Biarritz, d’une équipe de décontamination sur un fleuve, de policiers anti-terroriste à la féria de Pampelone, l’ hélicoptère et les soins d’urgence sur la place du capitole à Toulouse, une roquette tirée par des terroristes … Chacune de ces séquences ajoute au climat d’angoisse et à l’oppression ,et à aucun moment le film ne fait « cheap ». Ensuite il ya la réponse à cette fin de l’humanité qui est clairement une proposition Hédoniste des frères Larrieu .. Ce qui nous donne cette incroyable représentation du plaisir, avec une vraie maestria dans la peinture de la sensualité. La scène d’amour entre Karine Viard et Mathieu Amalric est cultissime. Jamais surement un cunnilingus n’ a été montré de la sorte dans un film. Karine Viard cadrée plein face, soulève le rideau rouge de sa jupe, dévoile sa touffe rousse luxuriante et le théâtre fauve commence. Amalric la lèche goulument. Son visage prend du plaisir; C’est extrêmement fort. C’est aussi beau que « La création du Monde » de Courbet. Il y a aussi le formidable Sergi Lopez , qui profite de cette fin du monde annoncée pour avouer à Amalric , son meilleur ami, qu’il est homo, et l’aime d’amour, il lui roule une pelle d’anthologie avant de se suicider. L’avant dernière scène dans le château des délices ( clin d’œil à « Eyes Wide Shut ») est magnifique. Cette orgie sobre , hédoniste, où l’amour, le plaisir sont consommés, comme un dernier luxe , les filles sont nues et s’enlacent, se roulent des pelles .Est-ce déjà l’arrivée au paradis ? Almaric ne manque pas d’ailleurs de se gaver de quelques cuillères de caviar . Juste avant il y avait eu la très belle scène avec Clotilde Hesme ( excellente , virginale et évanescente) où le couple se faisait cuire une omelette aux truffes , comme un autre adieu à la bonne chair, avant le décès de la jeune fille . La scène de la Feria de Pampelona est absolument sublime, comme une allégorie à la sauvagerie, à la fin du monde annoncée, avec ces mouvements de foule ordonnés, sauvages et destructeurs, avec les taureaux , symbole du dieu Mythra qui déboulent sur la foule. . Le passage à Taiwan est aussi un régal , pour moi qui connaît bien ce pays, c’est exactement cela, tout d’abord le bain de vapeur chaude , tellement Zen , où l’on fait la paix avec soi même , et puis le karaoké , un peu glauque, un peu triste, un peu figé, un peu désespéré, comme un point final, comme une petite mort .L’utilisation des flashbacks qui permettent de comprendre la vie passée de Almaric sont très bien fait, et sa main prothèse en plastique, nous permet de nous resituer immédiatement dans le temps. En effet le héros qui était en train de vivre une histoire d’amour fou pour une fille- mannequin , un peu volage , un peu libertine, ( la très androgyne et très belle Omahyra Mota ) veut aller au bout de sa passion , faisant fi de la catastrophe annoncée . La fille disparaitra à plusieurs reprises, mais il l’a dans la peau et il la retrouvera in extremis à Paris. La remontée sur la capitale , puis la déambulation dans les rues vidées de Paris , tous les deux nus , comme lors de la création du monde ,tel Adam & Eve, se fera accompagnés par les deux magnifiques chansons de Léo Férré : « Jolie Môme » ,puis « Ton Style », absolument sublimes. Un moment de grâce du cinéma, un moment d’anthologie, de toute beauté, et puis le plan final, coup de flash incandescent, pour tout emporter, l’amour & la mort. Tous les acteurs sont formidables . Un film énorme, émouvant , beau , sensuel, et très intelligemment construit.