Seconde réalisation d'Edward Norton mais première que je découvre, « Brooklyn Affairs » témoigne d'un amour assez étonnant pour le cinéma « à l'ancienne », sans jamais s'enfermer dans une logique réductrice ou intolérante type : « le cinéma, c'était tellement mieux avant ». Au contraire, à travers ce personnage atteint du syndrome de Gilles de La Tourette (!) plongé dans le NY des 50's apporte une vraie touche moderne, une singularité qui ne se démentira jamais tant ce héros donne une tournure, un ton différents des classiques hollywoodiens, tout en gardant leur élégance formelle (décors, costumes, musique) et en proposant un scénario de qualité, à base de corruption politique, secrets familiaux, amitiés inattendues... Parfois un peu confus, se perdant légèrement à travers ses différentes intrigues, bien qu'intimement liées, celles-ci sont toutefois suffisamment intéressantes pour qu'on se laisse prendre au jeu, notamment à travers cette dimension
« immobilière »
, bien exploitée, d'autant que le propos n'est jamais caricatural. Si Alec Baldwin est le
« méchant », il n'en pas moins toujours logique avec lui-même, faisant de ce politicien aguerri une figure assez ambiguë
. À ce titre, le casting est une des belles réussites de l'œuvre : Baldwin, donc, Norton, s'offrant le premier rôle à raison, Willem Dafoe, Bruce Willis
(que l'acteur-réalisateur s'offre le luxe de faire abattre au bout de quinze minutes, montre en main)
et surtout Gugu Mbatha-Raw, ne m'ayant jamais beaucoup marqué auparavant et faisant preuve ici d'une sensualité, d'une présence, d'une classe évidentes : j'y serais plus attentif à l'avenir. J'en viendrais presque même à me demander si, paradoxalement, ce personnage aux tocs violemment compulsifs apportent tant que ça au récit : j'en doute, mais il est par ailleurs tellement indissociable de l'œuvre qu'il est difficile d'imaginer celle-ci sans lui. Du bon cinéma, un peu à contre-courant mais pas trop, « vintage » mais pas vieillot : en tout cas, pour votre serviteur, ces 145 minutes sont malheureusement passées presque aussi vite que le temps de distribution du film en salles. À découvrir.