Le joli film de Nassim Amaouche est une oeuvre pointilliste, petits pétales de vie les uns à côté des autres. Une petite ville; l'usine a fermé, restent là ceux qui ne savent où aller, des maghrébins, qui "attendent" un retour au bled, le fils de la voisine (Dominique Reymond) qui "attend", dans une sorte d'autisme, le retour de ce père (qui ressemblait à Gary Cooper) qui ne reviendra jamais. Francis (Jean Pierre Bacri) est veuf, amoureux de la voisine et il a la charge de ses fils franco-marocains, l'un qui bosse pour le super marché - avec une casquette en forme de tête de souris quand c'est la semaine du fromage... et Samir, qui rentre après avoir fait de la prison pour trafic de drogue. Francis attend le retour de Samir, mais il y a autre chose dans sa vie : quand l’usine a fermé, il réparait une machine. Alors, il continue à la réparer, parce que, quand on a commencé un travail, il faut aller jusqu’au bout. Bacri est excellent dans ce rôle où il ne cabotine pas, où il ne bacrise pas, où il rend avec finesse la psychologie de ce père pudique, qui éclate de bonheur au retour de Samir mais essaye de ne pas trop le montrer… Comme il n’a sûrement pas été payé somptueusement pour sa prestation, on se dit : Monsieur Bacri est un mec bien. La réparation est terminée, la machine remarche, les anciens sortent dans la rue pour écouter le bruit retrouvé. Que reste-t-il dans la ville ? La dernière vivante dans ce monde étiolé, la superbe Nejma (Sabrina Ouazani) part à Paris: elle veut autre chose qu'une vie de serveuse dans le bistro pouilleux de papa. On montre quelquefois des paysans français incapables de quitter leur terre lorsqu'elle ne les nourrit plus, pour ces immigrés là, le problème est le même. Même pour Samir dont la vie est là et en même temps il n'y a pas de vie possible pour lui. Malheureusement, il faut finir sur une note triste. L’excellent Yasmine Belmadi qui interprète Samir s’est tué bêtement, à 33 ans, en scooter. Trop moche.