Dead Man est un western "stylisé" de Jim Jarmush. Ici stylisé ne signifie pas tellement qu'il a plus de style qu'un autre western, qui est un genre où la mise en scène, notamment des fameux duels, est très importante, mais que sur certaines scènes, le style est plus important que le fond.
Ainsi si vous aimez les films au scénario crédible et au rythme entraînant, pas la peine de lire le reste, il existe d'excellents westerns à la réalisation plus traditionnelle, même en noir et blanc. Si ce n'est pas votre cas, poursuivons:
L'histoire, tout d'abord, est celle de William Blake, homonyme d'un célèbre poète anglais, qui arrive dans la ville inhospitalière de Machine pour y trouver un emploi de comptable. Malheureusement, les ennuis lui tombent si vite dessus qu'il se retrouve le soir même en cavale, blessé et poursuivi par les trois plus terribles chasseurs de primes du continent.
Il va être recueilli par l'indien métis Nobody qui, connaissant les écrits du premier W.Blake, croit voir en cet homme blanc la réincarnation de l'esprit du génial poète qui se serait égaré sur Terre au lieu de regagner le monde des esprits. C'est le départ d'un voyage initiatique pour le héros.
Mais comme d'habitude avec Jarmush, l'histoire n'est qu'un prétexte à son exercice de style. Ici l'important est bien sûr le noir et blanc, qui à mon sens n'apporte pas grand chose à l'oeuvre, mais surtout deux éléments fondamentaux.
Tout d'abord la musique de Neil Youg. Elle accompagne quasiment toutes les scènes d'un riff métallique de guitare électrique souligné par un thème plus traditionnel mais plus discret. Cette musique, très belle au demeurant, peut parfois sembler inappropriée pour certaines scènes. Malgré tout elle est en grande partie responsable de l'intérêt du film et le décalage finit par ne plus être si frappant.
Ensuite, les dialogues. A la manière d'un Tarantino, Jarmush aime à donner des dialogues totalement creux à ses personnages, écrits non pas de manière à faire avancer l'histoire, mais à exposer le caractère de ses personnages. Le registre comique est ici largement utilisé avec le logorrhéique chasseur de primes ou la redondance agacée des "i don't smoke" de Blake lorsqu'on persiste à lui demander su tabac.
Passons enfin sur le jeu des acteurs. Ici pas de fausses notes, pas de quoi s'extasier non plus, puisque quelque part le thème du film l'emporte sur le sujet, le fond sur la forme. Citons tout de même quelques scènes semblant sortir tout droit d'un western des années trente, où l'enchaînement des tirs puis les morts paraissent un peu risibles. Cela suit encore l'ambiance du film où le spectaculaire s'incline face à la contemplation.
En conclusion, Dead Man est, comme toute la filmographie de Jarmush, un film auquel il faut adhérer ou passer son chemin, mais qui vaut le détour si on aime le style, puisque c'en est l'intérêt principal.